PORCUPINE TREE – Rudolph Weber Arena d’Oberhausen – 06 novembre 2022

« Since 1984 we create together – Be yourself, everybody else is taken« . La mention maladroitement ou plutôt naïvement manuscrite qu’arbore la chemise délicatement repassée d’un Steven WILSON propret et bien loquace – telle l’aurait griffonnée un adolescent sur sa veste de jeans – cette mention n’est probablement visible que par le premier rang de cette remarquable Rudolph Weber Arena d’Oberhausen. Et encore, avec de bons yeux ! Julilatoire : sans doute cette définition sied-elle le mieux à cet Evening with Porcupine Tree qui n’en porte pas le nom mais néanmoins présenté comme tel par WILSON. Rien ne laissait en effet supposer que ce set en deux parties allait nous emmener trois heures durant dans un survol sans pareil de la carrière de PORCUPINE TREE (soit 2h40 de show, entracte de 20′ déduit).

Après douze ans de silence interrompus par la seule prolifique production solo d’un Wilson toujours aussi musicalement boulimique, le nouvel opus de PORCUPINE TREE a pris tout le monde à contre-pieds en juin dernier, convaincue qu’était la Planète Rock que jamais le band ne renaîtrait de ses cendres. S’il n’est selon nous pas l’album le plus abouti de l’Arbre à Porc-Epic, Steven WILSON réussit néanmoins l’exploit de nous le performer dans son intégralité ce soir sans tomber dans le travers habituel de tous ses pairs: celui de le jouer d’une seule traite, avant de passer (ou après être passé) à autre chose.

Avec un percutant Blackest Eyes qui ouvre le set, le tempo est donné. Even Less, dans une version longue de 7 minutes, suivra un tir groupé de 3 morceaux tirés du dernier né qui s’enchainent sans qu’on n’ait le temps de réaliser la fourberie. Wilson en maître de cérémonie sans pareil nous distille ainsi de-ci de-là son dernier chef d’oeuvre, mine de rien, entre 2 classiques ou pépites ressorties de son catalogue et en nous évitant l’indigestion d’une démonstration d’un seul tenant, d’un seul jet.

Entouré de son fidèle Richard Barbieri aux claviers et de l’extraordinaire (le mot est faible) Gavin Harrison aux drums qui ont tous deux participé à la conception et à la genèse de cet album-surprise, Wilson explore sans cesse un monde sonore décalé que d’aucuns, à court d’imagination ou de vocabulaire, définiront de manière réductrice comme du rock progressif alors que la production de PORCUPINE TREE ne peut pas être corsetée dans un genre particulier. Wilson a tout expérimenté, du rock psychédélique aux paysages sonores électroniques de la pop expérimentale en passant par de classiques influences et de métallique détours. Dans le plus grand secret, les trois lascars travaillaient sur le projet depuis 2010, à travers un fichier dénommé PT2012 sur le PC de Wilson (rebaptisé ensuite PT2015, puis PT2018, etc.).

Une poignée seulement de photographes sont accrédités, et c’est heureux dès lors que nous sommes relégués sur l’étroit podium du FOH pour officier lors des deux premiers morceaux du… second set, dont malheureusement un Bying New Soul joué dans une pénombre voulue et presque totale. Les 2 guests à la rythm guitar et à la basse (Nate et Randy) sont ironiquement présentés comme venant de New-York UK et du Texas, UK, avant que le show ne plonge dans la spirale d’une nouvelle dimension, d’un nouvel espace-temps avec un Anesthetize qui assène le coup de grâce à une arena qui n’en espérait pas tant. Sleep Together clôturera le second set, annonciateur d’un rappel de 3 morceaux dont Train en finale – « Puisque nous n’avons jamais fait de hit en tant que tel, nous n’avons pas la pression de le jouer ni vous l’impatience de l’attendre ! Toujours est-il que nous allons clôturer cette soirée avec ce qui pourrait s’y apparenter sans que ce n’en soit pourtant le cas…!« . Sacré Wilson, va.

Steven WILSON demeure un extra-terrestre, et remplir exceptionnellement d’imposantes arenas telles que celles de toute cette tournée n’est pas pour lui anodin. Il se remémore d’ailleurs un show donné non loin d’ici à Stuttgart il y a bien des années où la salle ne comptait que 40 (ou 14 ?) spectateurs. Nous sommes plus de 10.000 ce soir, arborant des t-shirts de rock progressif, de métal et de rock mainstream comme le souligne très justement Steven WILSON lui-même en observant ironiquement l’assemblée. Sans doute ici se situe tout son génie conceptuel, celui de rassembler tous les genres, de transcender tous les styles et d’en réunir toutes les générations. Sauf erreur blasphématoire de notre part, God is Back… (ou alors ça en a tout l’air).

Now online : SAXON + DIAMOND HEAD @ Trix Anvers + URIAH HEEP @ Cirque Royal Bruxelles

From lockdown to rockdown… The Strong Arm of the Law a encore frappé fort, très fort ce 12 octobre au Trix d’Antwerpen. Peut-être parce que le tout dernier concert d’avant lockdown de SAXON s’est tenu ici-même par un beau soir de mars 2020, en guise de warm-up d’une tournée prometteuse qui n’eut finalement jamais lieu pour les raisons que l’on sait…? La nouvelle démonstration de force de ce soir 12 octobre 2022 a dès lors comme un goût de revanche, comme une saveur de « On remet ça, les gars !« . Par contre, la précédente fois que nous avions vu DIAMOND HEAD ouvrir pour SAXON en 2018 était passée plus facilement, dirons-nous…

Et que dire de URIAH HEEP (Established 1969) le surlendemain 14 octobre 2022 au Cirque Royal de Bruxelles ?! Tout simplement un monument historique qui prend place dans un espace d’exception, notre Royal Albert Hall à nous ! Reviews now online, ainsi qu’ici dans notre galerie de portraits From backstage to frontstage (NO Photoshop. NO Ligthroom. NO raw format. NO numeric nor digital overdub : ONLY pure one-shot JPEG!)

URIAH HEEP – Cirque Royal Bruxelles – 14 octobre 2022

Du lockdown au rockdown, URIAH HEEP poursuit son méga “50th Anniversary Tour » même si pas mal de dates sont annulées après cette soirée bruxelloise: les effets conjugués de l’inflation, des coûts énergétiques et de la crise ambiante ont ainsi raison de quelques dates à venir du HEEP qui en a pourtant vu bien d’autres depuis 1969. Btw, combien de bands peuvent-ils se prévaloir de compter Kiss, ZZ Top, Foreigner ou Rush comme opening-acts, permettant à ces groupes de se faire connaître ? URIAH HEEP est sans conteste un lien et un liant incontournable de l’histoire du (hard) rock britannique, contribuant à l’instar du Zeppelin, de Sabbath et du Purple au développement d’une forme typiquement britannique de production pour le moins lourde et métallique.

L’allongement de la carrière n’est donc pas un vain mot pour le HEEP (the Beach Boys of Heavy Metal – sic) : combien de travailleurs déjà actifs en 1969 usent-ils encore leur bleu de travail à l’usine ou s’escriment-ils encore derrière (ou devant, c’est selon) un écran d’ordinateur ? Parce que le senior en chef aka Mick BOX et sa clique de jeunes et fringants croulants pourtant pas encore secs derrière les oreilles sont, eux, toujours au taf après plus de 50 ans de bons et loyaux services. Toujours sur la route. Always on the road. Todi su l’voye. And long, long is the road.

Le public ne se bouscule cependant pas au portillon du Cirque Royal, tout comme il ne se pressait pas non plus le mois dernier à la Rockhal. Les survivants des glorieuses sixties-seventies-eighties seraient-ils devenus trop pantouflards que pour bouger leur popotin et faire honneur aux derniers héros parmi les dernières gloires ? Feraient-ils à URIAH HEEP l’affront de se réserver pour la momie junkie et nobélisée de service qui officie demain à Forest National ? Non, Môssieur, ne mélangeons quand même pas les genres, ni surtout les torchons et les serviettes.

Parmi toutes les (vieilles) gloires à l’affiche de la vidéo rendant un vibrant hommage aux jubilaires, Alice Cooper en sort vainqueur à l’applaudimètre. S’en suit, toujours comme à la Rockhal, une première partie de set statique et semi-acoustique depuis l’avant-scène mais qui n’empêche pas cette fois l’assistance de rapidement quitter le douillet confort des légendaires fauteuils rouges de cette toute aussi légendaire salle à la si remarquable verrière.

La pause écourtée – ah, cette si charmante et si désuète sonnerie d’une autre époque qui invite l’assistance à rejoindre sa place ! – la seconde partie de set passe au mode tout électrique et full Marshall, vu-mètres dans le rouge. De quoi entretenir la légende d’un URIAH HEEP qui n’a strictement rien perdu de sa superbe, de sa flamboyance, de sa force de frappe et de sa puissance dévastatrice.

Sans doute est-ce le souvenir marquant et émouvant que nous garderons de ce qui est probablement ce soir notre dernier face-à-face avec l’hydre. Souhaitons maintenant au HEEP, à l’issue de cette tournée qui n’est pourtant pas qualifiée d’adieu, de quitter la scène la tête haute et de tirer sa révérence en pleine gloire – ou du moins ce qu’il en reste – en évitant de nous gratifier du triste et pathétique spectacle de la tournée de trop, travers dans lequel sont tombés bien d’autres plus jeunes seniors

SAXON – Trix, Anvers – 12 octobre 2022

Pas moins de 16 Marshall et 4 Markbass estampillés de l’aigle SAXON : avec ces 20 caissons flanqués de part et d’autre des drums installées quant à elles sur un podium à l’effigie de Carpe Diem, Airbourne pourrait presqu’aller se rhabiller avec sa panoplie d’opérette ou quasi. Place aux pointures. Place aux références. Place aux Seigneurs. Manants, passez votre chemin ! SAXON traverse les âges et les époques comme un… percolateur, dirons-nous : il fait partie de notre routine et de notre décor, il nous gratifie de bons et précieux plaisirs quasi quotidiens, il nous remet les idées en place et nous fourgue le coup de fouet nécessaire le moment venu. SAXON n’est tout simplement rien de moins que l’indispensable parmi les incontournables essentiels : SAXON est à la NWOBHM ce que l’huile de palme est au Nutella et tout l’inverse de ce qu’est Canard WC à l’ornithologie.

SAXON est la bande originale d’une époque révolue mais qui a réussi à lui survivre. Davantage encore que les Iron Maiden, Def Leppard, Tokyo Blades, Girlschool ou autres Tygers of Pan Tang, étendards de cette nouvelle vague qui n’en porte désormais plus que le nom et en transporte parfois le fumet de la naphtaline, SAXON a conservé l’ADN de cette glorieuse époque: Byff et sa bande transpire littéralement la NWOBHM comme aucun autre en en ravivant les sonorités et les gimmicks. Pire : ceux qui prétendraient rivaliser avec SAXON seraient tout simplement remisés au rang de pathétiques ringards, à l’inverse d’un SAXON qui irradie encore – parce qu’il l’a transcendé – un genre pourtant désormais si dépassé.

Alors que d’autres sont devenus old-fashioned, SAXON lui est désormais vintage, vintage au point d’en être revenu au goût du jour comme tous les effets de mode aux cycles répétitifs. La flagrante antithèse d’un pathétique DIAMOND HEAD qui officie en première partie et dont les lambeaux font peine à voir et surtout à entendre, comme un steak dégelé qu’on tenterait de ramener à la vie alors qu’il n’en fait plus partie depuis le clos d’équarrisage.

SAXON laisse à Maiden les stades et à Def Leppard les midinettes. SAXON laisse à Motörhead le mythe, à Judas Priest les honneurs et à Whitesnake les couvertures de magazines. Parce que SAXON ne s’occupe que de poursuivre l’écriture en lettres d’or d’une NWOBHM sans compromission, sans artifice et sans fard. Une NWOBHM dont l’histoire se confond désormais avec celle de SAXON, pour les siècles des siècles. Amen.

MOTORPSYCHO – Het Depot, Leuven – 23 septembre 2022

Nos Norvégiens préférés ont donc emballé une fois de plus Het Depot avec leurs plages psychédéliques lourdes et indisciplinées comme on les aime, avec un de ces longs concerts aventureux qui part dans tous les sens, parfois même au sein d’un seul morceaux. MOTORPSYCHO ne reste jamais dans sa zone de confort musical, combinant expérimentation et morceaux plus accrocheurs, puisant avec dextérité et puissance dans tout ce que la musique occidentale a pu produire au cours des décennies écoulées. Mais en faisant en même temps toujours incontestablement du Motorpsycho, allez comprendre. Et toujours dans cette p… de semi-obscurité pour empêcher les objectifs de travailler comme il se doit.

On ne sait jamais combien de temps va durer un show de MOTORPSYCHO. On ne sait jamais pour combien de temps on est parti et ce soir ne fait pas exception: des heures. Et quand on dit des heures, ce ne sont pas deux… Le show est annoncé en deux sets avec une interruption d’un quart d’heure après 90 minutes, en soulignant bien qu’un rappel est en outre prévu à l’issue du second set. Des heures, qu’on vous dit: on ne se refait pas, MOTORPSYCHO non plus et c’est heureux.

Un Mellotron stage-left, un Hammond stage right, tout est dit: même un sourd saurait ce qui l’attend. Le trio devenu quatuor sur scène pour un meilleur rendu nous emmène ainsi dans un trip qui se poursuivra le lendemain avec leurs comparses à l’affiche de ces 25 Years of Orange Factory dont ils assurent ce soir l’ouverture en fanfare. Et quand on parle de fanfare, on parle bien de space, de desert et de psychedelic rock bien wachoté dans un shaker et déversé avec finesse et lourdeur sur scène. Et que dire de cette ligne de basse: un mur du son surdimensionné qui, par ses loops et ses spirales, renforce l’hypnotisme ambiant dans lequel nous emmène déjà un écran aux images totalement psyché. Vous reprendrez bien un peu de LSD…?

Un décoiffant zeste de classic-hard vient pimenter cette sauce déjà chaudement relevée quand MOTORSPYCHO nous balance dans les gencives une dantesque reprise de Rock Bottom. Et nous pensons à ce moment à toute notre chance d’avoir pu assister cet été à la prestation d’UFO au Hellfest, avant que le band ne mette prématurément un terme définitif à sa toute aussi définitive tournée d’adieu – crise cardiaque de Sir Phil Mogg oblige.

MOTORPSYCHO n’en est pas encore là, et les nordiques demeurent bien seuls maîtres à bord dans un style qui n’a pas son pareil, aussi difficile à résumer qu’impossible à décrire sans en réduire toute sa richesse et sa subtile complexité. Si beaucoup ont tenté de les imiter, pas un seul n’a encore réussi, quoique la concurrence sera rude demain sur les mêmes planches avec Monkey3, Elephant9 et Hypnos69. Mais c’est quoi cette manie des chiffres ?! MOTORPSYCHO est le numéro gagnant, punt aan de lijn comme on dit ici.

ALBERT BLUES BAND fête son 25ème – Arlon, 17 septembre 2022

Que de premières sur la scène de l’Entrepôt ce soir ! L’Albert ne monte pas à cru ce soir, réussissant la gageure de s’entourer d’une kyrielle de chaudes et fines gâchettes. Il n’est en effet pas certain que 12 musicos (gaumais de surcroit, personne n’est parfait même pas à Châtillon…) aient déjà occupé simultanément les quelques mètres carrés de la scène de l’Entrepôt, promiscuité plus torride encore en y adjoignant la cornemuse inhérente au It’s a Long Way to the Top ou la flûte enchanteresse de Locomotiv Breath. Pas certain non plus que les murs de l’endroit aient déjà résonné d’un Nugent du meilleur tonneau avec un Stranglehold à la ligne de basse tout simplement cataclysmique à mettre à l’actif du Coco.

Car c’est ça les 25 ans de l’ALBERT BLUES BAND: le meilleur de leur propre production mâtiné de classic-rock hors des sentiers battus et aux antipodes des standards dont les radios mainstream nous rabâchent les oreilles. Et des relents band of friends quand ce n’est pas carrément band of sons & daugthers pour donner plus encore de consistance et de corps (et de coeur) à cette set-list de choix en l’enrichissant de cuivres qui s’imposent par-ci, de backgrounds en choeur par-là, et de quelques lignes bien senties d’Hammond juste comme il faut quand il faut et là où il faut.

La bande à ALBERT BLUES BAND nous régale ainsi d’un set en deux parties bien charpentées et ô combien couillues pour célébrer de manière festive le patron Al’ aux manettes de l’orchestre (sic !) depuis un quart de siècle. Entouré sur scène de ses fidèles amis et comparses mais néanmoins band mates devant l’Eternel, sans compter les fils de et les filles de (comme en politique), face à un public de fidèles amis et proches, ne manquaient finalement que le gâteau et les bougies à souffler d’un bon coup de larsen bien senti. Ce sera pour les 30 berges de l’Albert et son orchestre dans 5 ans, mildje ! « Olé ! » hein Denis ! Parole d’Ardennais.

Now online : URIAH HEEP – HAMMERFALL – HELLOWEEN @ Rockhal, 14 septembre 2022

… et plus encore dans notre galerie de portraits ! Ou comment se couper en trois entre la Rockhal Box et le Rockhal Club pour trois shows de bien haute tenue quoique sans beaucoup de points communs entre les deux salles. Le HEEP fête en toute intimité son glorieux 50ème anniversaire (postposé par le covid) tandis que HAMMERFALL et HELLOWEEN se la jouent grandiloquente et sans retenue. Now online… NO Photoshop – NO Lightroom – NO raw format – NO overdub – ONLY one-shot jpeg : enjoy !

URIAH HEEP – Rockhal Esch-sur-Alzette, 14 septembre 2022

La pandémie a empêché URIAH HEEP de célébrer comme il se doit ses 50 berges, et le band entend bien récupérer la sauce en se lançant 2 ans plus tard dans une presqu’interminable tournée jubilaire. Mais la configuration assise du Rockhal Club jette comme un froid sur ce qui s’annonçait comme une belle surprise-party : URIAH HEEP en configuration assise, c’est comme prendre soudainement un sacré coup de bambou, comme se retrouver à mâchonner un morceau de tarte sèche lors d’un goûter dans une seniorie alors qu’on s’attendait à sortir en boîte…

Pour en rajouter une couche, le hall de la Rockhal comporte ce soir un modeste espace « memorabilies » à côté du merchandising, où sont exposées quelques reliques estampillées URIAH HEEP qui ont traversé les décennies: décorations reçues, photos vintage, diplômes en tous genres et autres reliques marquées HEEP glanées sur les 5 continents au gré des tournées mondiales d’époques aujourd’hui révolues. Comme un arrière-goût de naphtaline.

Le set débute par une longue et intéressante projection d’hommages rendus au HEEP par tout ce que la planète rock compte comme célébrités, mythes et légendes vivantes. Le film projeté sur un écran translucide dressé en avant-scène laisse deviner en arrière-plan le matériel déjà installé: mais alors pourquoi, pour qui ces instruments disposés sur l’étroite avant-scène au pied même de cet écran ?! Tout simplement pour URIAH HEEP qui nous offre en première partie de soirée un set semi-acoustique – que nous pourrions qualifier pour notre part de tout à fait dispensable. Le HEEP n’a à notre connaissance jamais excellé dans cet exercice, et celui-ci est de surcroit parfaitement saugrenu voire inopportun quand on connait la puissance et l’énergie qui caractérise le band depuis des décennies. Heureusement pour nous, HAMMERFALL et HELLOWEEN mettent à sac le main hall voisin où nous nous réfugions pour échapper à cette première partie de set pour le moins terne et creuse, osons même le qualificatif soporifique.

L’électricité, l’énergie et la puissance caractéristiques de URIAH HEEP sont par bonheur au rendez-vous en seconde partie de set, et quelle seconde partie ! Nous retrouvons enfin un HEEP digne de ce nom, et un légendaire Mick Box fidèle à lui-même qui déclenche un tsunami sans avoir l’air d’y toucher, tout en finesse et en subtilité mais aux effets dévastateurs. URIAH HEEP semble plus soudé que jamais, faisant montre d’une symbiose sans faille et d’une franche complicité qui fait plaisir à voir et surtout qui charme le conduit auditif.

Le quintet nous délivre au final un bien long set, doté de toute l’énergie et de toute la puissance nécessaires, qui nous transporte à travers les décennies et les âges avant même que, back to the future, on rejoigne l’année 2022 sans même le réaliser. URIAH HEEP fait ce soir la démonstration qu’il compte toujours parmi les plus respectables et les plus honorables des seniors hyper-actifs, et qu’il n’est pas nécessaire de faire de vagues pour rester au-dessus de la mêlée. Avec la classe, la distinction et l’élégance qu’on lui connait, URIAH HEEP nous donne une nouvelle fois une bonne leçon et renvoie tous les autres à leurs devoirs. Et nous à HELLOWEEN dans la salle voisine boucler la boucle…

HELLOWEEN +HAMMERFALL, Rockhal – Esch, 14 septembre 2022

Une fois le grand rideau HELLOWEEN tombé sur l’avant-scène, le spectacle peut commencer. Et quand on parle de spectacle, on parle de spectacle: les drums sont juchées sur une citrouille géante d’un orange éblouissant au pied d’un écran tout aussi surdimensionné, et c’est parti pour un galop effréné. Les consignes shooting sont surprenantes au premier abord (photos durant le 1er morceau uniquement) mais s’avèrent finalement conformes aux habitudes et à la norme, ce 1er morceau (Skyfall) s’étirant sur un bon quart d’heure, rien de moins. Le ton est donné.

Les duos ou duels aux vocals s’enchaînent aux duels et aux duos aux guitares dans des envolées plus folles les unes que les autres: l’énergie insufflée par ses deux binômes aux lead vocals et aux guitares nous offre en alternance de mémorables passes d’armes, tantôt sur l’avancée front stage tantôt de part et d’autre de la citrouille. Cet enrobé-drainant délivre un produit fini plus que complet qui emplit les yeux et rempli amplement le volume d’une Rockhal comme replongée par magie dans le meilleur des eighties-nineties. Evoluant aujourd’hui avec pas moins de sept membres, HELLOWEEN continue d’orner de lettres d’or un style qui n’existerait pas vraiment sans ces Hamburgers: le power metal / speed metal mélodique, pour ces connoisseurs qui aiment cataloguer ces bands qui n’ont quant à eux jamais ô grand jamais demandé à être étiqueté de ceci ou de cela.

Nous avions découvert la joyeuse folie de HELLOWEEN il y a quelques semaines à l’occasion du dernier Hellfest; nous nous étions alors juré de ne pas manquer leur prochain passage. Car HELLOWEEN sur scène, c’est la fête, c’est une bande de joyeux drills, c’est ambiance de carnaval, un joyeux bordel potache organisé qui déménage et emmène son public dans une spirale ascendante de bonne humeur et de douce folie, de riffs et d’envolées qui vont se terminer on ne sait jamais trop où ni comment. Et quand ça s’arrête, on se demande tout simplement ce qui a bien pu se passer…

HAMMERFALL avait déjà bien entamé la partie en délivrant un opening-set de haute tenue. Dans le même registre, les Suédois n’ont rien à envier à la tête d’affiche du jour: si le set débute en retard du quart d’heure peu académique, HAMMERFALL met manifestement les bouchées doubles pour rattraper le temps perdu voire pour se faire pardonner. C’est chose faite à l’issue d’une prestation de près d’une heure, la Rockhal nous offrant presque de la sorte une double tête d’affiche.

Et l’on peut même parler d’une triple tête d’affiche en considérant URIAH HEEP qui célèbre ses 50 ans et plus dans la salle voisine. Il y a des soirs comme ça où l’on ne sait où donner de la tête ni où braquer son objectif. Les affaires ont comme qui dirait (définitivement ?) repris; reste maintenant à espérer que ce n’est pas un feu de paille…

Now online : TOTO – Rockhal, 23 août 2022

Il est de ces valeurs sûres qui portent parfaitement bien leur nom: TOTO est de celles-là. Mais il est également de ces valeurs sûres qui peinent à se renouveler, qui peine se réinventer et qui, trop sûres d’elles peut-être, se reposent trop franchement sur leurs acquis. TOTO est ainsi de ces bands qui vivent à crédit, le crédit de leur (incontestable et incontestée) gloire passée. La Rockhal garnie de sexas dégarnis en est une des illustrations. AOR for ever & TOTO pour rêver: now online (… Hold the Line…) ainsi que dans notre galerie de portraits. Et comme toujours: NO Photoshop. NO Ligthroom. NO raw format. NO overdub – ONLY pure one-shot JPEG.