Ma découverte de ce sympathique club qu’est Den Atelier à Schpountz City. Les jours qui ont précédé ce mini-festival ont été chauds, différents médias annonçant la venue de Ted Nugent himself en tête d’affiche. Un fax lui envoyé m’a vite fixé : le grand Ted me répond illico presto de sa plus belle plume qu’il n’en sera pas, occupé d’ailleurs à tourner aux States. Fausse rumeur donc, probablement colportée pour donner un coup de projecteur supplémentaire sur l’événement. C’est en tous cas bien la première fois que qu’un absent fait couler plus d’encre dans les médias que les présents… ! Second à l’affiche, le ou un des guitaristes de Manfred Mann Earth Band dont j’ai oublié le nom (!) succède à Tony MacAlpine. S’en suit le génial et prolixe Pat Travers – que je découvre enfin en chair et en os – avant que Steve Luckather (le guitariste de Toto) ne clôture les hostilités en fin de soirée, le tout avec Jimi Hendrix en toile de fond et avec ses géniales compositions en fil rouge de la soirée pour ce tribute. On prend un pot et d’autres au bar en jouant les retardataires pour terminer la soirée en beauté quand Pat Travers himself se pointe près de nous, pour faire de même semble-t-il. On taille une sympathique bavette avec le Canadien : première et chaleureuse rencontre avec l’homme, qui sera suivie d’autres par après.
Étiquette : Nugent Ted
Retour vers Detroit, la Motor City bien nommée, et plus précisément downtown: Joe Louis Arena. Je dois me pincer en poussant les portes de la salle, en me persuadant que je suis bien là, que je suis bien ici, que c’est bien le soir du New Year’s Eve Whiplash Bash du Nuge. Cela fait des années (des décennies ?) qu’il gratifie son Michigan natal d’une mini tournée entre Noël et Nouvel An avec cette soirée de réveillon en point d’orgue, en apothéose.
Et j’en suis. Qui plus est, assis dans les places VIP à côté de… Charlie Hunn, son ancien guitariste devenu depuis cadre chez Ford. Alice COOPER assure toujours la première partie et chauffe admirablement bien la salle. Celle-ci est énorme, immense, gigantesque, et se remplit au fur et à mesure que le premier groupe (des gars du cru) joue déjà.
L’assemblée est bariolée : des rockers purs et durs mais toutes générations confondues, des familles entières venues avec papa, maman et les enfants, et surtout – surtout – un public féminin comme ces derniers soirs, à l’inverse de ce qu’on peut connaître en Europe. Quel bonheur quand, pour chauffer l’assemblée, ces blondes à forte poitrine (!), assises sur les épaules de leur copain ou de leur copine, commencent à relever leur t-shirt pour exposer leurs généreux attributs aux exclamations et acclamations de la salle ! C’est à celle qui déclenchera la plus longue clameur… Ambiance américaine, peu concevable en Europe. Et, plus surprenant encore, en cours de soirée, ces centaines de couples arrivant en smoking et en longue robe de soirée, venant assurément terminer leur réveillon ici sur place, ou s’offrant un break au milieu de leur nuit de nouvel an avant de repartir vers de nouvelles aventures ! Le clan Nugent au grand complet est toujours là, et le Nuge prend le relais après qu’Alice Cooper ait chauffé monstrueusement la salle. Arrivée de Ted sur scène sur son… bison: impressionnant et surréaliste. Le concert du Nuge sera un moment d’anthologie – avec les douze coups de minuit en point d’orgue, paroxysme, quand descendront du plafond des milliers de ballons multicolores dans un déluge de décibels et d’explosions de lumières et de fumigènes après que le grand Ted ait lancé à toute la salle un compte à rebours pour les 30 dernières secondes de l’année. Ce décompte se termine par un magistral « Happy Fucking New Year ». Un feu d’artifice explose… en intérieur: une première pour moi ! Délire dans la salle, tout le monde s’embrasse, se serre la pince, chante, hurle, crie… avant que le concert ne recommence de plus belle. Et avec quoi ? Avec Motor City Madhouse. Le coup de massue ! Le plus grand moment de tous : Motor City Madhouse joué live à Detroit, Motor City. S’il ne fallait retenir qu’un moment, ce serait celui-ci. Le public n’en peut plus – l’hystérie totale – la communion – la fusion – l’osmose.
Le retour vers mon minable motel de banlieue pour une dernière nuit avant le retour vers l’Europe me sortira de mon rêve pour me ramener dans une réalité bien plus glauque et misérable : celle d’une métropole américaine comme une autre, celle d’une ville tout court : pauvre, salle, minable.
Un problème de ticket me fait repasser par les Tedquarters à Jackson – l’occasion de revoir tout le staff qui n’a qu’une question à la bouche : « How did you find the show yesterday ? Did you enjoy it ? ». Comme si la réponse n’allait pas d’elle-même ?! En route pour Saginaw et le second concert – on m’a promis un backstage qui m’attend aux guichets : je me pince pour y croire, tâchant de contenir mon excitation de peur qu’un pépin ou qu’un imprévu ne transforme ce rêve en cauchemar…
Saginaw City, Michigan : le Nuge est bien à l’affiche du Civic Center avec, qui plus est, Alice COOPER en première partie, autre régional de l’étape ! Ce n’est d’ailleurs pas vraiment une première partie (deux groupes locaux s’en chargent) mais bien un double concert ! Je quitte bien vite ma place VIP pour descendre dans la fosse et vivre le show tel qu’il doit être vécu : de front. Alice est exceptionnel et ne cesse d’annoncer la couleur tout au long de son set (« Everybody’s here for The Nuge, everybody ! ») – ce que le Nuge lui rendra bien des fois en demandant à plusieurs reprises durant son propre show des acclamations pour Alice : ils sont bel et bien de bons vieux complices depuis des décennies, et cela ne m’apparaît tangiblement qu’aujourd’hui. Le set du Nuge sera – subjectivement – parfait. Que dis-je ?! perfectissime ! Mais rien à faire : ma main ne quitte pas ma poche où se trouve mon « After Show Pass » en prévision de mon accès backstage en fin de concert ! Il me faudra attendre une bonne demi-heure après le show avant d’être admis backstage par le Tour Manager qui vient me chercher à la demande de Sasha Nugent.
Rapide présentation (« Where do you come from ? What’s your name ? » etc.) avant qu’il ne me guide dans les dédales de l’arena jusqu’à la dressing room du Nuge. Gasp !!
Me voilà dans l’antre, pincez-moi svp, pincez-moi FORT ! Le Nuge, sorti il y a peu de sa douche semble-t-il, est installé dans un fauteuil, seul dans la loge, en train de manger une assiette froide. A notre vue, il se lève d’un trait et vient me saluer en me serrant vigoureusement la pince tandis que son Tour Manager procède aux présentations d’usage : surréaliste ! Le Nuge repart bien vite s’installer afin d’achever son assiette, m’invitant par la même occasion à l’accompagner. Le buffet est dressé sur la table, à boire et à manger : que des légumes et de la charcuterie, et des soft drinks – jus de légumes ou jus de fruits. Et me voilà installé dans le fauteuil jouxtant celui du Nuge, tous deux en train de manger et boire tout en devisant. Enfin, quand je dis en discutant, c’est un grand mot pour qui connaît le Nuge : une question de 5 mots entraînant une réponse de 5.000, une réflexion d’une phrase suscitant une répartie de 500 phrases, le Nuge est bien fidèle à lui-même : intarisable et passionné – un vrai moulin à paroles qu’il n’est pas aisé d’interrompre ! La conversation passant de la musique à la chasse et des armes à la politique, voilà-t-y pas que le grand Ted de m’expliquer les différentes législations européennes en matière de chasse à l’arc. Surréaliste ! Belgium se résume pour lui à FN (non pas Forest National mais bien Fabrique Nationale), aux gaufres, aux chocolats et à… Cat Scratch Fever (cf. la pochette intérieure de l’album du même nom). Et se remémore, rigolard en la narrant, l’histoire de ce journaliste belge qu’il a foutu violemment hors de sa chambre d’hôtel à Bruxelles en plein interview pour je ne sais plus quelle obscure raison que je n’ai pas bien comprise – je n’ose pas lui faire répéter de peur que cela m’arrive également ! Une heure de bonheur avec le Nuge seul en tête-à-tête dans sa loge, si ce n’est l’arrivée de sa fille Sasha – grâce à qui je suis là – qui nous rejoint en cours de conversation pour finalement ne plus nous quitter. L’heure avançant, vient le moment de mettre un terme à ce rêve éveillé : Ted me gratifie d’un autographe sur une affiche prise à la va-vite dans le hall d’entrée (« My Belgian Bloodbrother»!). Nous sortons tous trois du complexe par une porte dérobée à l’arrière du bâtiment afin d’éviter les dizaines de fans qui font encore le pied de grue à la "sortie des artistes". Dernières poignées de mains et accolades avant que le Nuge n’embarque dans sa Jeep Wrangler de laquelle il prend tout simplement le volant pour repartir chez lui, Jackson Mi., au beau milieu de la nuit et comme qui dirait après une journée de turbin. Comme dans sa loge (passablement défraîchie, soit dit en passant), nous sommes bien loin des clichés du show biz, bien loin des strasses et des paillettes, des pépées et de tout le toutim… Impressionnant, le Nuge: aussi calme et pondéré qu’enflammé et excité, posé ou passionné et passionnant selon les moments et les sujets. Quant à moi, je rentre à mon motel pas très éloigné de la salle, me demandant si tous les événements de cette soirée sont bien… réels.
Une telle invitation ne se refuse pas, jamais… ! Même si elle date en réalité de cinq ans auparavant (1991), j’entretiens la marmite à feu doux pour maintenir le fumet d’actualité. Bruxelles – Chicago – Detroit : est-ce bien raisonnable de s’offrir un tel mini-trip outre Atlantique pour 3 concerts du Nuge ? Hé bien oui, la réponse est définitivement oui : cela est tout à fait raisonnable, sinon je ne l’aurais pas refait une seconde fois quatre ans plus tard… ! Detroit sous la neige : pas facile de se remettre à la boîte automatique dans la Ford de location pour rejoindre Jackson, Michigan, et le quartier général de Ted où j’ai rendez-vous : Tedquarters!
Je pousse la porte et fais connaissance de tout le Nuge Staff. Ma boîte de Belgian Chocolates a bien résisté au voyage et n’est que la moindre des gratitudes. Je poursuis ma route jusque Kalamazoo, Mi., où se tient ce soir mon premier concert.
Nuge Country : partout Ted Nugent depuis Detroit ce matin : à la radio, à la tv, dans les journaux, sur affiches, dans les conversations dans les bistrots,…. Je comprends mieux aujourd’hui l’appellation Michiganiacs !! Kalamazoo – Gibson’s homeland : que rêver de mieux comme cadre pour mon premier concert du Nuge dans son fief ?! Installation dans un minable motel à un jet de pierre de la salle, puis direction l’antre.
J’ai oublié le nom des deux premiers groupes qui assuraient la première partie, mais qu’importe c’est pour le Nuge que tout le monde est présent. Je suis au premier rang pour être aux premières loges et vivre pleinement ce nouveau face-à-face, là où il se doit : à proximité de la Bête ! L’ambiance est torride, le public déchaîné – il faut voir ce qu’est un show du Nuge sur ses terres ! Je suis en nage à l’issue du concert et ne réalise pas encore totalement la baffe que je viens de recevoir – ni même le fait que je suis au beau milieu du Michigan pour l’annuel Ted Nugent’s Whiplash Bash, la traditionnelle mini-tournée qu’il effectue depuis des lustres entre Noël et Nouvel An dans son Michigan natal, avec en apothéose le New Year’s Eve Whiplash Bash à Detroit le 31 décembre pour y célébrer les 12 coups de minuit: c’est pour dans quatre jours…
Le Nuge dans une salle de moyenne capacité en plein centre ville : on croit rêver ! Ca sent bon la bière et la cigarette, le plafond est bas, la salle est déjà bondée à notre arrivée et un mur de Marshall (ou de Peavey, déjà ?) annonce la couleur. Tous les ingrédients sont réunis pour une soirée chaude de chez chaude chez les Kaas! Après le fromage suisse en entrée comme la veille à Paris, le plat de résistance: le Nuge débarque sur scène, virevoltant et tournoyant comme un Liliputien suspendu à un câble invisible : une entrée en scène dont je ne suis pas près d’oublier le moindre détail ! Mon premier concert – et l’un des derniers également, Dieu m’en préserve – où mon oreille ne distingue parfois plus les sons tant le volume est au rouge, le cerveau ne captant plus qu’un long biiiiiiiiiiiiiiip en lieu et place de ce qui sort des Marshall : impressionnant. If it’s too loud, you’re too old : n’empêche…! Le set de Gonzo sera subjectivement parfait, le Nuge occupant l’espace comme s’il était trois à lui seul, arpentant la scène d’un côté à l’autre, contraint de slalomer entre ses comparses, quand pas sautant du haut de ses Marshall. Waow ! Les Kaas en ont eu plein la vue et plein les oreilles. Le show disponible en DVD « Ted Nugent’s New Year’s Eve Whiplash Bash 1988 » filmé le 31 décembre de cette même année à Detroit, Rock City, devant 20.000 Michiganiacs est la copie (quasi) conforme de la bombe qui s’est abattue sur Tilburg un beau et surtout un bon, très bon soir d’avril 1988.
Le Nuge à Paris vaut bien une journée de dispense de service militaire, non ?! J’ai obtenu de longue date déjà le ticket numéroté… 00008 : un présage pour un concert subjectivement géant dans un Zénith tristement vide ? Les Parigots auraient-il cru à un poisson d’avril ? Ou peut-être sont-ce les Suisses de Krokus en 1ère partie qui font fuir (à raison) la populace parisienne ? Peu importe : mon deuxième face-à-face avec le Nuge est d’autant plus puissant que Derek St-Holmes est de retour à ses côtés pour assurer pas mal de vocals et prendre en charge une rythmique qui enfle d’autant le jeu aérien du Nuge. Nom de Dieu, quelle puissance de feu ! La sueur dégoulinant de sa crinière sur ses Gibsons Byrdland donnent à celles-ci un éclat d’or dont il n’a pourtant pas besoin pour nous balancer ses classiques comme ces derniers et ô combien puissants Painkiller et autres Little Miss Dangerous.
Nugent reste Gonzo, un guitariste déjanté, spectaculaire et doué, un show sonore et visuel à lui tout seul ! Quelques clichés argentiques sans grande valeur ni qualité immortaliseront cependant sur les murs de ma chambre cette soirée dantesque. Et ce n’est que sur la route de nuit qui me ramène au bercail, après quelques haltes parisiennes désaltérantes, que l’idée me vient tout à coup à l’esprit: et pourquoi n’irais-je pas revoir le Nuge demain soir en Hollande, finalement ?! Le début d’une longue succession de concerts, de déplacements, de voyages et de souvenirs vient de s’enclencher par un curieux concours de circonstances dont furent victimes un beau soir mes neurones encore probablement sous le choc et les décibels…
Après avoir côtoyé chaque jour le Nuge durant plus de 6 ans (lui, punaisé en deux dimensions aux murs de ma chambre), voici venue l’heure de mon premier face à face avec le grand Ted – un moment qui marque une vie ! Il sourit bien des fois, avec l’un ou l’autre clin d’oeil amusé, en voyant ce grand dadais que je suis – immobile, planté debout, presqu’hypnotisé en le dévorant littéralement des yeux à quelques mètres de la scène, fixe au milieu d’une foule gesticulante et hurlante. Une foule étrangère à la magie qui est en train de se produire, étrangère à la réaction en chaîne que ce face-à-face allait engendrer durant des décennies… K.O., je suis littéralement K.O. lorsque le Nuge quitte la scène, me pinçant pour m’assurer que ce n’était pas un rêve, tâchant de recouvrer mes esprits et quelques miettes de raison au bar en me rafraîchissant davantage que les idées. Immense. Puissant. Terrible…
Judas Priest peut jouer, peu m’importe: le Nuge est à Bruxelles, il est venu, il a vu et il a vaincu – les British qui assurent ensuite peuvent être bons, nuls, très bons ou lamentables: je ne suis plus de ce monde pour en attester (… d’ailleurs je suis sourd – If it’s too loud, you’re too old). La photo ci-après est la seule de ce site que jemprunte, hommage à son auteur maintenant décédé: