Après sa flamboyante prestation de cet été au Blues Festival de Gouvy, retour en Belgique de notre Finlandaise préférée pour une seule date – en l’occurrence sur les planches du Spirit of 66 cette fois-ci, lequel reprend quelques couleurs après avoir vaillamment affronté catastrophes sanitaire et climatique.
Maintenant online… et clichés originaux en primeur dans notre Hall of Fame
Tel le phénix, le Spirit of 66 renaît de ses cendres. Non seulement victime d’une année et demi de crise sanitaire à l’instar de tout le secteur événementiel, ce haut-lieu du circuit a en outre subi de plein fouet le tsunami qui a frappé Verviers en juillet dernier. L’épais et robuste volet métallique, rideau de fer, a joué à merveille son rôle protecteur en évitant que le ras-de-marée ne ravage tout l’intérieur du club comme ce fut le cas dans toutes les habitations voisines. La Place des Martyrs n’a jamais aussi bien porté son nom, et le décor de désolation demeure tel près de quatre mois après la catastrophe meurtrière. Quelques décimètres d’eau « seulement » ont occasionné d’importants dégâts aux sols et sous-sol du club, mais ont épargné la majeure partie du matériel et des murs – toute proportion gardée évidemment. Et le grand cirque de reprendre progressivement place au Spirit depuis le mois dernier déjà, grâce à la solidarité et aux incroyables efforts de rénovation et de réparation déployés par le patron des lieux.
Le show de Erja LYYTINEN au Spirit of 66 est pour nous particulier à plus d’un égard. Tout d’abord parce que notre tout premier concert à subir les affres du lockdown sanitaire du printemps 2020 fut celui de Russ BALLARD prévu ici-même le 14 mars 2020. Principe de précaution: le concert fut annulé par un Russ pour le moins visionnaire, quelques jours seulement avant que le confinement généralisé ne soit édicté par les autorités européennes. Comme une relique du Monde d’Avant qui nous inciterait à ne pas l’oublier, l’affiche de cette tournée annulée en dernière minute demeure – comme un coup de poing dans la figure – en bonne place à l’entrée du club, nous rappelant le caractère dramatique de cette époque exceptionnelle et peut-être pas révolue.
Le concert de ce soir est ensuite particulier dès lors que le premier show auquel il nous ait été donné de prendre part après ces confinements à répétition fut précisément celui d’Erja LYYTINEN, à l’occasion du Blues Festival de Gouvy début août dernier. C’est dire combien son concert, et de surcroit ici-même, représente une double charge émotionnelle et symbolique d’un début et d’une fin (provisoire?) de crise…
Notre Erja, toute en professionnelle qu’elle est – et toute en nordique beauté – débute son set à l’heure précisément dite (20h30) devant une audience modeste mais enthousiaste. 40 minutes plus tard, la Finlandaise d’annoncer une pause avant de relancer ensuite la machine pour un second set nettement plus énergique et plus convainquant – entendez plus emballé et plus emballant. Même les réglages de la sono semblent mieux ajustés à une prestation qui s’en ressent manifestement.
En toutes choses, la première fois demeure éternellement la première de toutes. Il en va de même pour Erja LYYTINEN dont notre première expérience avait laissé en nous une impression absolue. Il semble en être différemment ce soir, à l’issue d’une prestation plus irrégulière marquée de momentums inégaux à mettre peut-être également sur le compte d’une audience moins portante que ne l’était celle de Gouvy cet été. A moins que nous fassions le difficile et la fine bouche, oubliant dans le feu des 6 cordes que la plus belle femme du monde (désignée « The Best Guitarist of the Year” aux European Blues Awards 2017) ne peut donner que ce qu’elle a ?
BACK IN BUSINESS ! Après plus de 17 mois loin, loin, trop loin du rock’n’roll circus, et le rock’n’roll circus bien trop loin de nous – pandemie mondiale oblige – retour aux sources, aux fondamentaux et aux choses sérieuses: back to the roots avec le Blues Festival de Gouvy édition 2021, dans cet inénarrable écrin spatio-temporel de la Ferme Madelonne.
Ni une ni deux, Erja LYYTINEN et son band nous assène carrément le grand jeu à l’occasion de ces retrouvailles post-covid (… on l’espère), près d’un an et demi donc après notre dernier gig. Il faut supposer que The BOOGIE BEASTS ont dû méchamment chauffer la bougre finlandaise au préalable backstage, en décrassant par la même occasion onstage les conduits auditifs de l’audience à l’heure de la tarte et du goûter dominical.
Et comme l’écrit si bien le patron des lieux, le Claude LENTZ, les feux de la rampe à peine éteints :
Back in business – Back online – Stay tuned for more pix & comments! Et comme toujours, clichés exclusifs et en primeur dans notre galerie. Enjoy, Folk’s !
Personne ne nous a dit que c’était impossible, donc nous l’avons fait… L’écriteau apposé à l’entrée de cet Utopia moderne met le festivalier au diapason et donne le ton de ce Gouvy Blues Festival. Celui-ci ne fera donc pas l’impasse deux années consécutives, à l’instar de la plupart des (plus) grands festivals de cette année 2021 qui ont derechef remisé la clé sous le paillasson…
Ainsi donc, seule l’édition 2020 sera passée par pertes et profits coronavirus. 17 mois et 4 jours après notre dernier pit-photo lors du concert de SAXON au Trix d’Antwerpen en mars 2020, nous reprenons la route du r’n’r circus et retrouvons les effluves, le thrill et les sensations du live, de la foule, de l’ambiance, de la convivialité, de la promiscuité, des bières qu’on te renverse sur le falzar et de l’odeur des aisselles moites et humides sautillantes à hauteur de ton nez. Alleluiah !
Conjuguant tranquillité et musique de qualité, les habitués savent pourquoi Gouvy is Groovy. Hors du tumulte de la ville, on vient à la campagne chez l’ Claudy par de petits chemins qui sentent encore bon la noisette. L’équipe des volontaires – les derniers guerriers romantiques de cette Utopia – est là pour accueillir le festivalier d’âge relativement mûr, tout à l’image de cet irréductible bastion de la Ferme Madelonne qui résiste encore et toujours à toute mégalomanie et dictature du tiroir-caisse.
Faite de brics et de brocs, de tonnelles instables et d’aubettes tout aussi rudimentaires, cette 41e édition du plus géant des petits festivals résiste ainsi à l’envahisseur contre vents et marées, hors des sentiers battus, dans le parc boisé de la Madelonne. Plus encore que les éditions précédentes, le bosquet madelonnien tient plus du mariage improbable de la jungle de Calais avec la ZAD d’Arlon que d’un festival répondant à la bienséance des normes.
Parce qu’ici, chère Mèdème, il y à à manger à chaque coin d’arbre, à boire derrière chaque buisson, et à rire et causer sous la plus improbable aubette ou la plus squive des tonnelles. Les récentes pluies rendent les sentiers tortueux plus boueux que jamais, au risque de se prendre un arbre dans la tronche ou une branche dans les parties. L’atmosphère lourde et humide du sous-bois maintient bien bas, sous la canopée, les fumées aromatisées des braises où grillent saucisses et hamburgers. La pils (Lupulus, s’il vous plait !) abreuve les gosiers de ceux qui redoutent l’effet long terme des Orvaulx ou la consommation libre de Rochefort. C’est que boissons et musiques riment ici avec qualité et puissance, Môsieur. Et en matière de puissance, l’explosive Erja LYYTINEN sait de quoi elle parle, la bougre, elle qui dispose de tous les arguments nécessaires pour clouer le bec à tout imprudent détracteur.
Tout juste reconnue parmi les 30 meilleurs guitaristes blues au monde « aujourd’hui » par un sondage du magazine « Guitar World », la Finlandaise se hisse 14e aux côtés de pairs et de légendes du genre comme Joe Bonamassa, Eric Clapton, Derek Trucks, Buddy Guy et John Mayer pour n’en citer que quelques-uns. Tout classement étant aussi relatif que subjectif, aux 60.000 (é)lecteurs nous préférons quant à nous l’épreuve du mur: celui au pied duquel on reconnait le maçon. Et en termes de (ma)son, le mur de la Finlandaise est robuste et massif telle une inexpugnable forteresse sonore. La standing ovation que lui réserve le public – par ailleurs debout – ne trompe personne sur la marchandise: elle est de qualité et au pedigree sans discussion aucune. Vivement la revoir au Spirit of 66 en novembre prochain à Verviers pour peu que l’ Francis, propriétaire des lieux, se relève du tsunami des inondations catastrophiques qu’il a subies après avoir été frappé par la crise sanitaire…
Il faut dire que The BOOGIE BEASTS avaient déjà solidement chauffé le chapiteau en milieu d’après-midi, au point de provoquer l’envol probable et la non moins délicate dispersion de milliards de microscopiques variants delta, dans une atmosphère chaud-boulette contenue par la toile faîtière d’un chapiteau suintant de dégoulineries microbiennes.
Des rythmes obscènes et entrainants, un slide hypnotisant, un harmonica hurlant et un chaos de fuzz servent un (variant ?) delta blues électrique à cheval entre les Black Keys et John Lee Hooker (version Rolling Stones) comme si l’on était télétransportés dans l’arrière salle d’un juke-joint du Mississippi.
Tout l’inverse de LITTLE MOUSE & The HUNGRY CATS qui fait méchamment retomber le soufflé. Les Français livrent un set soporifique et creux comme un jour sans pain (et sans vin), ponctué d’interminables interludes et de bavardages aussi inutiles que superflus. Mais à tout chose malheur est bon: cet intermède musical sans intérêt aucun fait le bonheur des pompes à Lupulus et autres aubettes à divins nectars sous les tonnelles de la forêt de Sherwood – voire au bar du Club au charme toujours aussi désuet et suranné.
BIG DADDY WILSON et son BLUES QUINTET peut terminer la soirée: de toute façon, la messe est dite depuis que la Finlandaise a remisé sa 6 cordes dans la valise. Et les petits lutins vont bien vite retrouver la quiétude des lieux jusqu’à la prochaine déferlante de décibels. Ite missa est. Amen.