« Un fusil à pompe, deux grenades, une petite arme de poing légère et maniable. Un fusil à pompe, deux grenades légères et maniables, ton gilet pare-balles, une trousse de s’cours, un gun qui tire en rafales, un détecteur de mines si tu vas dans la cour. Un fusil à pompe, deux grenades, légères et maniables, légères,légères…
» Un petit biscuit pour dix heures, un couteau de chasseur. Dans la boite pour midi, des tartines puis ton maillot pour la piscine. Un fusil à pompe, deux grenades légères et maniables. Ah, j’oubliais le lance-roquettes dans la poche droite de ta mallette ! Allez, avale ton chocolat on décolle: faut pas être en retard à ton premier jour d’école. Un fusil à pompe, deux grenades. Légères et maniables…
» Ton gilet pare-balles, un fusil à pompe, deux grenades: faut pas être en retard à ton premier jour d’école. Un fusil à pompe, deux grenades, légères et maniables… «
Plus on est sur scène, moins élevé est le cachet ?! 22 € en pré-vente (26 € sur place), qui a dit que le prix des tickets atteignait d’indécents sommets ?! Pour un band US de classe mondiale alignant pas moins de 7 musicos sur la scène de Het Depot à Leuven, on peut dire que BLACKBERRY SMOKE nous en a donné pour notre argent. Enfin… peut-être pas vraiment, mais pour d’impondérables et tristes raisons sur lesquelles nous revenons plus bas.
Now online et toujours dans notre GALERY « From backstage to frontstage ». NO Photoshop. NO Ligthroom. NO raw format. NO numeric nor digital overdub : ONLY pure one-shot JPEG !
Tumeur au cerveau… Elle n’aura pas eu cette fois encore la peau du valeureux Britt Turner, mais presque. Avant même la mi-concert, Charlie Starr interrompt subitement le set et explique pour ceux qui, comme nous, ne l’auraient pas remarqué, que le frère Turner est en passe de tourner de l’oeil derrière ses fûts et qu’il leur faut stopper net les réjouissances. Un roadie emmène fissa backstage le Britt tandis que les autres membres s’éclipsent sans mot dire. Silence. Lourd et long, long silence bien des minutes durant face à une scène vide et plongée dans la pénombre.
Charlie revient finalement au micro, sa gratte sèche en bandoulière, pour annoncer au public encore sonné et silencieux que le set est terminé. En guise de maigre consolation, accompagné des deux autres guitares qui le rejoignent, le trio nous gratifie toutefois sobrement de deux ultimes morceaux en version unplugged, avant de saluer définitivement et humblement l’assemblée.
Les connoisseurs savaient, nous pas: Britt Turner souffre d’une tumeur au cerveau qui, régulièrement, prend le dessus mais surtout ses commandes neuronales. Jusqu’au jour où ces douloureux malaises auront définitivement raison de lui: si ce n’est pas encore ce soir, Dieu seul sait quel soir sera son dernier set. Les deux heures de concert prévues sont amputées de moitié, avant que l’assemblée – sold out – ne se disperse dans un silence et une retenue dont les murs du Depot ne doivent pas être coutumiers.
Ceci dit, la première heure du show a tenu toutes ses promesses: du rock sudiste pur et (pas) dur, cheveux et barbes longues, des santiags et trois guitares: la dégaine ne trompe pas le chaland sur la marchandise. BLACKBERRY SMOKE concentre tous les ingrédients possibles du boogie, du rock & roll, du bluegrass et du blues. Et surtout cette south touch qui hume bon le Deep South et fait hérisser illico le moindre poil de l’échine à l’instar d’un bon vieux Lynyrd Skynyrd, Molly Hatchet, The Marshall Tucker Band ou 38 Special à côté desquels BLACKBERRY SMOKE pourrait encore passer pour des gamins pas encore secs derrière les oreilles.
Het Depot flaire bon ce soir les champs de coton, la Floride, l’Alabama et la Géorgie réunis autour d’un bluegrass mâtiné de boogie quand pas de country voire même de hard rock. Il n’y a pas à dire, il n’y a rien à dire, mais BLACKBERRY SMOKE n’a définitivement plus rien à prouver et les sold-out qui parsèment toute cette tournée européenne en sont l’illustration la plus manifeste qui soit.
Mention spéciale à READ SOUTHALL BAND qui a le délicat privilège d’ouvrir la soirée face une audience sold-out à leur insu. Et ils s’en sortent fichtrement bien, les jeunots. A new southern star is born ?
Confiner et corseter SAXON à den Atelier revient à brider une Mustang Shelby 500 ou à verser délicatement un grand cru dans une fiole : il leur faut de l’espace, du volume, du cubage pour qu’ils s’épanouissent, pour qu’ils développent leurs arômes et laissent libre cours à leur folie, pour qu’ils exploitent toute leur folle démesure. SAXON était ainsi bien à l’étroit à Luxembourg, même si ce n’est malheureusement pas la masse du bon peuple qui nécessitait d’écarter les murs de den Atelier… Now online et toujours bien sûr dans notre GALERYFrom Backstage to Frontstage, All the World is a Stage…
Qui eut pu croire que le lendemain même de ce show – le tout 1er du Seize the Day World Tour 2023 et date désormais historique – Paul Quinn annoncerait mettre fin à sa carrière après avoir fondé SAXON il y a près de 50 ans maintenant ? Les quelques dates restantes de mars seront honorées par le groupe qui annule par contre celles d’avril en Amérique du Sud, en attendant probablement de se retourner pour la suite. Si suite il y a: une page se tourne, à moins que ce ne soit le livre qui se referme – l’avenir nous le dira…
Ceci dit, le bon peuple ne s’est pas pressé en masse et même si le rez-de-chaussée est bien densément rempli, Den Atelier a fermé l’accès au balcon pour sans doute concentrer l’assistance sans la diluer. Face à la minuscule scène, le son est d’une puissante perfection et d’une parfaite puissance pour bien vite tourner en bouillie sonore lorsqu’on s’éloigne de cet axe central. Au point de peiner à distinguer le titre que SAXON à inséré entre The Eagle has Landed et Black is the Night qui ne figure étrangement pas sur la set-list dont nous avons volé le cliché depuis le (bien trop) étroit pit-photo en début de set.
Il faut d’ailleurs être bien svelte – ce que nous ne sommes plus – pour se glisser entre les caissons de basse et la barrière délimitant ce pit–photo, et il est tout aussi illusoire d’espérer bouger une fois sa position occupée: les 6 ou 7 photographes que nous sommes occupent absolument tout le minuscule rikiki espace disponible. Comme d’habitude…
Notre dix-douzième concert de SAXON (ou plus peut-être ?) sera donc le dernier avec un Paul Quinn dont rien ne nous laissait présager le départ. S’il avait probablement déjà pris sa décision ce soir, l’avait-il déjà communiquée à ses band-mates ? Jouaient-ils tous en connaissance cause, sachant l’annonce qu’ils allaient faire le lendemain ? Nous ne le saurons jamais. Fidèle à lui-même, ne se mettant jamais en avant, demeurant toujours aussi discret que bougrement efficace, Quinn abat comme d’hab’ un boulot de titan en faisant mine de ne pas y toucher.
Les standards défilent comme sur double best-of de SAXON saupoudré de quelques extraits de leur dernier Seize the Day. Mieux encore qu’un best-of: une very-best-of d’une heure trois-quarts qui balaye plus de quatre décennies et demi, en faisant la part belle aux pépites qui ont assis la réputation de SAXON au firmament de la NWOBHM qu’ils n’ont jamais quitté. C’est dans les veilles casseroles qu’on fait les meilleurs soupes, et pas forcément avec de jeunes carottes: si la preuve en est donnée une fois encore ce soir, SAXON sans Quinn ne sera plus jamais ce SAXON-ci. Ne sera plus jamais SAXON tout court, et ça fait d’autant plus mal en considérant ce very-best-of qui rappelle combien tous ces monuments ne sont pas éternels. La disparition de Gary Rossington pas plus tard qu’il y a quelques jours encore ne cesse de nous le rappeler…
Les Fransquillons jouent désormais dans la cour des tous grands, et la démonstration de force de ce soir (re)met les pendules à l’heure pour qui en aurait encore douté. Scène gigantesque, écrans LED et light show en conséquence servent une sonorisation également peu commune, d’une impressionnante puissance de feu et d’une qualité hors paire – pas façon oppression thoracique gentillette du sternum mais plutôt celle qui te défonce la poitrine à la manière d’un bulldozer en stationnement sur ton buste. Now online et dans notre GALERYFrom backstage to frontstage, All the World is a Stage…
Hormis de dispensables pataquès de beauf – chassez le naturel, il revient au galop ? – GOJIRA réalise un sans-faute de très exactement 100 minutes dans le main-hall de la Rockhal, après avoir maintes fois déjà rempli son club voisin. Mais ça c’était avant, bien avant que le quatuor ne remplisse les +20.000 places de l’Accor Arena de Paris pas plus tard qu’hier…
Devenu géant de la scène métal outre-Atlantique, GOJIRA décroche maintenant le succès qu’il mérite en Europe, mettant fin à l’adage que nul n’est prophète en son pays. Les Landais poursuivent ainsi la tournée-monstre de leur septième et dernier album Fortitude que la pandémie a interrompu en 2021-2022, tournée à la hauteur de la 12ème place atteinte par ledit album dans le Top 200 du Billboard US.
GOJIRA joue donc maintenant l’égal des plus grandes pointures mondiales, et le barnum en est à l’image. Une scène sur trois niveaux, un écran gigantesque est positionné en arrière-scène des frères Duplantier, et un décompte de 180 secondes précède le début des hostilités. Aussitôt terminé, la pyrotechnie grille nos poils dans le pit-photo tandis que les gars de la sécurité nous éloignent prudemment des canons à serpentins géants avant chaque déflagration – pas facile de shooter au milieu des shrapnells.
Mais l’homme ne se nourrit pas que de show: un déluge de décibels, puissant et dévastateur, s’abat sur la Rockhal après le tohu-bohu déjà du hard-core de EMPLOYED TO SERVE qui ouvrait les hostilités et dont le We don’t need you aurait allègrement pu leur être retourné. S’en suit le ramdam de ALIEN WEAPONRY: débutant leur set par un traditionnel haka tout ce qu’il y a de néo-zélandais, ils poursuivent en maori dans la pure tradition tribale d’un Sepultura.
Puis vint donc le blast beat cataclysmique de Mario qui fait place nette dans la Rockhal, mettant tout le monde d’accord. Si GOJIRA ne fait pas dans la dentelle (ça, on le savait déjà), le quatuor pourrait se renouveler davantage encore, pêchant peut-être par un petit manque de diversité ou de relief (selon nous) parmi des compos nourries au même biberon et toutes sorties du même moule…
Quoi qu’il en soit, la phalange landaise du métal français a de beaux jours devant elle si on en croit l’affluence de ce soir à la Rockhal et l’âge relativement modeste de l’assistance, hormis quelques quinquas et sexas habitués du style et des lieux, la plupart vêtus de leur t-shirt à l’affligeant et habituel ton noir arborant noms et logos coutumiers. Tout a néanmoins une fin (sauf les saucisses, etc. etc.): avant de tous se quitter, 100 minutes de concert plus tard, GOJIRA restera un long moment sur scène pour remercier le public et les deux premières parties, comme pour faire durer plus longtemps encore un moment qui aurait été très peu probable il n’y a que quelques années encore. Un succès artistique spectaculaire et un métal activiste servant un engagement profond pour la cause écologique: total respect, les Frenchies.
Antichristian Icelandic Heathen Bastards… Pleaaaaaase welcome SÓLSTAFIR ! Si ça se comprend en english, la version en idiome islandais dégage également tout son charme et son lot d’exotisme. Une demi-heure de musique folklorique aux chants gutturaux permet d’ailleurs à l’assistance de se familiariser avec cette langue flexionnelle en prélude à l’arrivée du quatuor sur scène, manière d’échauffer (ou d’échauder ?) les esprits. Si l’oreille avertie devine ainsi aisément que la langue islandaise n’a pas subi de grands changements au cours des derniers mille ans, il en est tout autrement de la musique « de là-bas » – et l’on ne parle pas de leur iconique Bjork, bien trop conformiste, lisse et polie comparativement à nos génialissimes Antichristian Icelandic Heathen Bastards. Now online et déjà bien sûr dans notre galerie de portraits…
Une set-list griffonnée à la va-vite sur un bout de papier arraché à un carnet à spirales, puis déposé sur les planches du Spirit of 66 au moment de monter sur scène : real authentic genuine rock’n’roll… De trois choses l’une : ou Robert Jon & The Wreck explose sous peu à la face du monde, et une méritoire et méritée carrière hyperbolique s’ouvre à lui/eux ; ou Robert Jon & The Wreck poursuit sa magistrale maestria en tournant de petits clubs en modestes salles de part et d’autre de l’Atlantique; ou Robert Jon & The Wreck retombe tôt ou tard dans l’anonymat de ces milliers et milliers de groupes cantonnés à vivoter modestement corsetés dans leur quartier et injustement adulés de leur seule fan base. L’avenir nous le dira…
Robert Jon & The Wreck est de ces quelques bands dont aucun, strictement aucun album même live ne peut transmettre l’incroyable énergie dégagée sur scène. Aucun. Nom de D…, comme ces albums se révèlent abyssalement fades et mous du gland quand on a goûté au live… Quelle forme prendraient les compositions de Robert Jon sans ses Wreck derrière lesquels il s’éclipse humblement et régulièrement en arrière-scène pour leur laisser tout l’éclat des feux de la rampe ? Que serait Robert Jon sans son lead guitar tout bonnement extraordinaire mais aussi entouré d’une section rythmique métronomique et d’un keyboard tout aussi omniprésent que vintage ? Les Californiens ont réussi à tout intégrer dans leur bluesy noisy southern rock, symbiose parfaite d’Alman Brothers et des Black Crows à l’instar de Black Berry Smoke en passant par Thin Lizzy et Govt’ Mule. Longue vie à Robert Jon & The Wreck, quelle que soit la tournure que prendront les événements…
Mention spéciale à Meghan et Dave de BYWATER CALL (direct from Toronto), dont le band au grand complet se produira ici-même à l’automne, quelques semaines avant le side-project du virtuose de la six cordes de ce soir: KING TREE & The EARTHMOTHERS (psychedelicized & mysticized distortions of classic rock & soul music… Tout un programme).
Une Rickenbacker est toujours annonciatrice d’un moment exceptionnel, d’un show qui va dépoter grave. Ce constat, le plus empirique mais aussi le plus subjectif qui soit, va se voir une fois encore confirmé par celle de SÓLSTAFIR qui ne fait pas exception à notre règle. Et ce n’en est que plus vrai encore quand cette Rickenbacker est confiée au délicat traitement de celui qui a(urai)t été par cinq fois élu « The Sexiest Man of Iceland » (sic), le bien nommé Svavar « Svabbi » Austmann. Ses longues tresses rousses déboulant de dessous son chapeau n’y sont sans doute pas pour rien. Ou pas – allez appréhender les critères esthétiques de ces gens de tout-là-bas-au-nord-au-fond-à-droite.
SÓLSTAFIR n’a en tous cas pas son pareil dans le style qui est le sien, à l’improbable jonction peut-être de Motorpsycho et d’un Motörhead mais ascendant Hawkwind quand il est question de tisser des ambiances lourdes et oppressantes, ou langoureuses et lancinantes tout autant que psychédéliques et obsessionnelles. Les morceaux peuvent s’étirer à n’en plus finir, au point de parfois peiner à en distinguer le début de la fin dans un éternel recommencement ou dans une continuelle redite. SÓLSTAFIR, ou comme une impression d’infini, comme une aurore boréale qui s’étire à n’en plus finir, aussi vaporeuse qu’intangible.
Jusqu’au moment où l’ambiance vaporeuse se dissipe brutalement, très brutalement même, dans une déferlante et un blizzard de décibels qui ramène violemment l’assistance aux contingences existentielles liées au prix de la chope au bar et des énergies fossiles qui ont rendu couteux le déplacement jusqu’à la Rockhal.
Cette ambiance hyperbolique pour le moins particulière, parfois religieuse et hypnotique, parfois tribale et hystérique, est amplifiée par les silences impressionnants qu’impose à l’assistance – d’un seul geste – Aðalbjörn « Addi » Tryggvason, comme pour donner plus de profondeur et plus de puissance encore aux rares passages en sourdine. Assurément Guitry se référait-il à SÓLSTAFIR lorsqu’il lançait son célèbre « Lorsqu’on vient d’entendre un morceau de Mozart, le silence qui lui succède est encore de lui« . Si ce n’est qu’avec nos Islandais préférés, ces silences sont assourdissants.
Faut-il préciser que les bien nommés SÓLSTAFIR n’officiaient « que » en tant qu’opening act d’un dispensable KATATONIA, non sans délivrer un set de pas moins d’une heure quart quand même, excusez du peu. KATATONIA pouvait ensuite venir faire de la figuration, et uniquement de la figuration: il n’y avait que des restes à se mettre sous la dent, et à la dernière note des Islandais la messe était dite. KATATONIA, nimbé dans la quasi pénombre ou au contraire camouflé à contre-jour par de violents et redoutables flashes stroboscopiques, tout est mise en scène pour dirait-on faire ch… les photographes attitrés durant les 3 titres réglementaires. A quoi bon accréditer si c’est pour officier dans de telles conditions…?