"Over 55 million records sold worldwide – 34 number 1 hits worldwide – Still touring & performing to sell out audiences worldwide…" @ Rockhal, Esch-sur-Alzette – 23 Oct. 2016.
Étiquette : Rockhal Esch
C’est ambiance caribou et police montée à la sauce canadienne ce soir, et on se prend dans les gencives l’affluence des grands jours dès l’accès aux parkings de la Rockhal. Le bon peuple est venu pour se trémousser sur NICKELBACK, les rockeurs sont venus pour déguster du MONSTER TRUCK. Le grand public est venu pour se dandiner avec NICKELBACK, les connaisseurs ont fait le déplacement pour savourer MONSTER TRUCK.
En forçant le trait, tailleurs, talons aiguilles et coupes de bulles pour NICKELBACK; cuir, boots et chopes pour MONSTER TRUCK. Chacun son style – on n’a pas choisi le nôtre, on est né comme ça.
Il est comme ça des opening acts et des special guests qui valent à eux seuls le déplacement: MONSTER TRUCK en fait partie. Il est par contre aussi des groupes qui sont devenus guimauve et mainstream sans même avoir eu le temps ni surtout pris la peine de confirmer tout le bien qu’on pensait pourtant vraiment (oui, vraiment) d’eux à leurs débuts: NICKELBACK est de ceux-là. A l’instar de Greenday ou de Limp Bizkit qui drainent un public similaire ou quasi, NICKELBACK ne restera jamais qu’un groupe mainstream parmi d’autres. Et qu’y a-t-il de pire pour des rockers que d’être mainstream, on vous l’demande…?!
Soirée tout en contraste donc, tant sur scène que dans une Rockhal pleine comme un Polonais en fin de carême, avec néanmoins un point commun, et non des moindres: une sono aussi ahurissante qu’époustouflante qui crache des décibels d’une rare violence mais d’une pureté tout aussi rarement atteinte. Chapeau le crew, ou chapeau la Rockhal – ou probablement beaucoup des deux.
Après YES et DREAM THEATER ici-même, au tour des enfants gâtés de NICKELBACK de refuser aux photographes l’accès au pit du front stage. Sans doute est-ce symptomatique d’un rock’n’roll circus qui, avec certains groupes, n’a plus de rock’n’roll que le nom, et révélateur d’un band qui se la pète décidément plus haut que son trouduc et qui ferait mieux de repartir au charbon dans son Alberta natal.
Relégués soit bien haut au plafond, sur la galerie, ou quasi moins pire à la table de mixage (notre choix), la tâche des photographes n’a pas plus de saveur que les ritournelles faciles d’un band qui se la joue désormais bien trop à l’aise également. Et à vaincre avec des rengaines sans péril, on triomphe sur scène mais sans gloire…
Ce soir, d’un point de vue strictement rock’n’rollesque, MONSTER TRUCK a dévoré NICKELBACK: le grizzli a bouffé du caribou tout cru et n’en a fait qu’une seule bouchée. Si NICKELBACK récolte certes les fleurs de la part d’une assistance qui leur est toute dévolue, leurs roses sont décidément mièvres et fanées quand on hume la senteur épicée et corsée des ronces déversées par MONSTER TRUCK. N’avoir été finalement accrédité-photo par NICKELBACK que sur l’invitation de MONSTER TRUCK n’en a pour nous que plus de saveur: être rock’n’roll et non pas mainstream, chacun son style. SLASH ne s’y était d’ailleurs pas trompé en 2014 en leur confiant la lourde tâche de chauffer les corps et les esprits…
"Goodbyyyyyyye ! " lâche avec un petit sourire ironique et narquois Patti SMITH aux 6 photographes accrédités que nous sommes à l’issue du second morceau déjà de "Horses"… La grand-mère du punk, la reine de l’underground new-yorkais a d’ailleurs décidé de nous parquer stage right, et une bande de scotch marque au sol la limite à n’absolument pas dépasser dans le pit. Elle ne souhaite manifestement pas être photographiée de face, dont acte. Soit. Caprice de star peut-être, mais qu’on lui pardonne déjà mille fois tant la seule évocation du nom de cette grande Dame du garage-punk des 60’s et 70’s est déjà toute une Histoire en soi. Une légende, un mythe, une icône, une poétesse, peintre, militante et anti-conformiste, bref: une Artiste comme ce XXIème siècle aseptisé n’en fait plus…
Une grand-mère de 70 berges qui vous envoie quelques mollards bien léchés sur les planches de la scène entre deux "Motherfuckers !" lancés à la cantonade, et qui bousille rageusement les 6 cordes de sa gratte dans un final dantesque de My Generation, on en redemande et plutôt deux fois qu’une, Madre de Dios ! C’est qu’elle conserve de beau restes, la tigresse, en nous balançant l’intégrale de "Horses" vieux de déjà 41 ans en première partie de set. Et celui-ci de se poursuivre une heure encore avec quelques extraits d’une carrière déjà bien longue sans omettre bien évidement ses incontournables Frédéric, People have the Power et autre Because the night qui enflamment une Rockhal qui n’en demande pas tant.
La semaine dernière, SLAYER se produisait à Den Atelier après avoir foulé la mainstage du Graspop. Aujourd’hui, c’est à nouveau un réel privilège d’être à quelques (centi)mètres d’une Patti SMITH irradiant la scène de la Rockhal Box le lendemain même de sa prestation à Hyde Park devant des dizaines de milliers de Londoniens lors du British Summer Time Festival. Icône (presqu’) intacte de toute une génération, godmother of punk, elle a aussi la tchatche ce soir à Luxembourg, la Patti SMITH, narrant avec beaucoup d’humour son set acoustique de l’après-midi au Mudam et sa rencontre avec le Grand-Duc et quelques autres dignitaires qu’on n’a pas pour habitude de lui présenter outre-Atlantique…
Un superbe When doves cry sera son hommage à Prince, après avoir égrené une impressionnante litanie de disparus qu’elle débute par Jimi Hendrix et qu’elle clôture par David Bowie. Comme pour nous rappeler faire partie de cette génération qui a enfanté le rock’n’roll ou à tout le moins qui l’a orné de ses lettres de noblesse. Les quatre frères Ramones font partie de son oraison, godmother of punk oblige, et son final explosif nous démontre que son titre n’est pas usurpé, que nenni ! Chapeau bas, Madame, et total respect.
"Patti, I love you !" lance un quidam depuis l’assistance. "Get in line…! " lui rétorque-t-elle avec son visage à la longue crinière blanche fendu d’un large sourire. Tout est dit…
De tous les projets enfantés au fil des années par le cerveau tortueux et torturé de Maynard James KEENAN en parallèle de TOOL (son vaisseau amiral) et d’ A PERFECT CIRCLE, le plus inclassable de tous est sans nul doute PUSCIFER. Pour le paraphraser, cet experimental band pourrait être de l’ordre de l‘electro-industrial rock project, ou relever de l‘absurdist in-joke, voire du desert-fried collaborative collective, ou encore une sorte de raunchy repository for Maynard’s bawdier lyrical excursions. A moins qu’il ne s’agisse plutôt de party jams for the impending apocalypse…? Allez (sa)voir…
Après ça, on s’étonnera qu’un show de PUSCIFER offre le mixte d’un spectacle de catch et d’électro-rock mâtiné de gospel, une scénographie d’art abstrait et de tableaux shamaniques. Une véritable expérience multi-sensorielle avec un pied dans le conventionnel musical, un pied dans l’alternatif visuel. A moitié dans le conventionnel visuel mais aussi à mitan dans l’alternatif musical, allez savoir sur quel pied danser face à cette comedia del arte des temps modernes ?!
Un concert de PUSCIFER défie toute attente, mais aussi toute tentative de classification. Le public non averti déguste des cinq sens, un mélange de musique, de sketchs, de chorégraphies, de comédie et de commentaires sardoniques sur l’état de la société. KEENAN réussit l’exploit d’un savant équilibre entre humour et gravité, maniant le juste dosage à la fois de provocation et d‘entertainment.
Quant à la bande-son de PUSCIFER – revenons quant même à nos fondamentaux – elle reste à la fois sombre et parfois lourde, parfois légère et fluide mais toujours aussi envoûtante et hypnotique. Ses loops ne sont pas sans rappeler les meilleurs hélicoïdaux de TOOL sans néanmoins les égaler en densité mais cependant plus hermétiques encore et plus difficiles d’accès pour une oreille non avertie (qui sera toutefois charmée par la légèreté de certaines compositions).
Pour ce premier passage au Luxembourg (et première tournée européenne soit dit en passant), Maynard James KEENAN entouré de sa bande d’acolytes / acteurs / musiciens / entertainers / etc. démontre qu’il reste un personnage hors du commun. A l’instar d’un Steven Wilson à la production aussi prolifique que débridée (mais ici un cran en-dessous, ‘ faut quant même pas déconner), l’introspectif côtoie l’explosif. La puissance de la force tranquille, la lourdeur de la libellule, la noirceur de la blanche colombe: PUSCIFER, c’est tout ça à la fois, et son contraire surtout.
Bientôt en ligne, The Astonishing en live (act 1 & act 2) à la Rockhal de Esch-sur-Alzette…
Bon, voilà encore une nouveauté, le dernier caprice d’un tour manager ou l’ultime lubie (phobie?) d’un groupe parano. Les cinq photographes accrédités que nous sommes, heureux détenteurs d’un pass-photo, ont été avertis qu’ils seront cantonnés sur une plate-forme de 5 m² jouxtant celle de la table de mixage en milieu de salle. Soit 1 m² par photographe, à des dizaines de mètres de la scène. Après les 15 premières minutes, les appareils doivent avoir quitté la salle – ordre du tour management. Soit. Ca fleure bon le real rock’n’roll live on stage tout ça, tu parles.
Décidément, après YES dans cette même Rockhal (ici) il y a près de 2 ans où nous étions parqués comme de dangereuses bêtes sur la passerelle fleurtant avec les hauts sommets du plafond au fin fond de ladite salle, suspendus à des encablures de la scène, nous voilà-t-y pas ce soir confrontés à un autre type de lubie. Peut-être pour ne pas gêner la vue de ces messieurs-dames ayant bourse déliée (85 €) pour s’offrir les premiers sièges d’une salle derechef en configuration full-assise ?! Quelle mouche pique donc ces artistes (?!) à ce point hautains et pédants qu’ils refusent de se voir tirer le portrait depuis le front stage en plein exercice…?! Ca pète plus haut que son cul, ce qu’on pourrait à la rigueur leur pardonner… s’il n’y avait ce qui suit.
Le prog-métal de DREAM THEATER ne nous a jamais transporté. Mais avec cet opéra-rock en deux actes joué dans son intégralité, le Théâtre des Rêves s’éloigne de son style soporifique, complexe et technique, pour sombrer dans le pompeux virant carrément au pompant. A la manoeuvre de cet opéra-rock qu’ils qualifient eux-même en toute modestie de monumental, les Américains prétendent privilégier sur ce double album conceptuel la mélodie à la technique. La démonstration de ce soir est tout sauf convaincante…
Le show aussi rébarbatif que statique se résume à une bande-son jouée live à grands renforts d’artifices visuels mais sans aucune consistance scénique. Sur les écrans, défilent personnages et scènes illustrant le scénario de cette dystopie au scénario tarabiscoté: la musique est produite de manière électronique par des drones contre lesquels le héros Gabriel va se rebeller (sic). Une trame qui n’est déjà pas de bon augure sur papier, que dire alors de sa transposition scénique…
Décidément non, ce virage effectué par DREAM THEATER ne nous réconcilie pas avec leur style, mais alors là pas du tout – que du contraire. Ils étaient au bord de l’abîme musical, ils ont fait depuis un grand bond en avant. Si cette production et cette mise en scène n’étaient à ce point pathétiques et d’un autre âge, d’une autre époque, nous pourrions leur pardonner en leur concédant le droit à l’erreur. Mais il ne s’agit ici pas d’erreur: ils se devront de plaider coupables. Nous avons tenu quant à nous 55 minutes, et ne sommes pas les premiers à quitter la Rockhal avant même le second acte…
La langue de Shakespeare distingue savamment "to perform" et "to play": la représentation de ce soir relève manifestement du second registre, bien plus pauvre et terne que le premier. Sans parler d’une salle complice qui, vue de notre plateforme, se résume à une bauge de mollusques ou d’invertébrés assis mollement, qui dodelinent et opinent du chef en se risquant parfois à lever un bras. Voire deux, pour les plus téméraires. Si le real rock’n’roll est mort avec Lemmy, c’est la musique moderne qu’on assassine ce soir – et même pas avec le sourire. Toute une frange des plus fidèles adeptes de DREAM THEATER n’en disconvient même pas, c’est dire. Ite misa est (sic transit gloria mundi)…
Foule des grands soirs à la Rockhal : SABATTON en sold-out dans le Club, et The SCORPIONS qui font quasi de même dans le main hall. Le n°1 de l’Avenue du Rock’n’Roll n’a décidément jamais aussi bien porté son nom… En 2012 ici-même, assistions-nous (ici) à la tournée d’adieu de SCORPIONS – The Farwell Tour. Quatre ans plus tard, même endroit, même heure, les Teutons sont toujours à l’affiche. Allez-y comprendre quelque chose, ma bonne dame, et un jour où l’autre viendra néanmoins la tournée de trop, le concert de trop.
Ne nous méprenons pas sur ce qui suit: nous a-do-rons The SCORPIONS. Mais époque Herman R., Francis B., Michaël Sch. et Uli Jon R. surtout… Si ce n’est pas la tournée de trop ce soir, le show de trop de Klaus Meine ne semble pas si éloigné que cela dans l’avenir. Comme éteint ou à tout le moins mauvais comédien ce soir, il est peu convaincant. Si ses vocals demeurent certes au top, ses sourires sont comme qui dirait forcés et ses harangues ont un arrière-goût artificiel de production de masse ressassée 50 ans durant.
Quelle est la pénibilité faîtière d’un concert de SCORPIONS ? Le spectacle affligeant et désolant du préposé à la batterie, ou ces interminables moments-guimauves qui semblent attirer ces milliers de spectateurs et autres rombières qui ont fait le déplacement et cassé leur tirelire (lire, tirelire la) ? Si ces – habituels – bémols mainstream nous sont de plus en plus pesants au fil des années, il n’y a cependant rien à jeter des deux autres tiers du show.
Une set list bien musclée nous promène efficacement dans le dédale des décennies passées du vrai SCORPIONS, rehaussée d’un impressionnant visuel toujours (très) haut de gamme. La preuve en est, ce rouleau compresseur n’est pas du goût de toutes les oreilles – notamment féminines – qui passent de la guimauve à la charpie, qui virent de rose Barbie à rouge-sang. Sachez Mesdamekes que figurent au tableau de chasse de SCORPIONS de véritables tueries et non pas seulement de crapuleuses minauderies. Et que oui, le scorpion peut méchamment user de son dard quand il décide d’encore piquer: c’est la blitzkrieg à tous les étages, wunderbar !
Une fois n’est pas coutume, la ligne de basse est tout aussi agressive qu’omni-présente, inversement proportionnelle à un Pawel Maciwoda aussi transparent qu’insipide. Il assure de la sorte sur scène le parfait (?) pendant d’un Matthias Jabs peu enjoué ce soir dont l’enthousiasme et l’entrain semblent dorénavant plutôt relever d’un formalisme de bon ton. Comme toujours (mais pour combien de temps encore ?), Rudolph Schenker irradie et demeure le showman flamboyant de service. Leader incontesté, arpentant la scène de long en large, il semble porter et assurer à lui seul le show en déployant tous ses artifices de guitariste chevronné à qui on ne la fait plus. Restera maintenant à compter les années durant lesquels ce cirque continuera de tourner, avec pour fauve un seul véritable équilibriste à la manoeuvre entouré de figurants sur le départ (… ou sur le retour).
Même s’il ne faut pas cracher dans la soupe de scorpion, la tambouille symphonique épique de BEYOND the BLACK qui officiait en première partie était d’une affligeante banalité parsemée de lieux communs cent fois éculés. C’était déjà le présage d’un menu peu équilibré où la cuisine de fin gourmet côtoyait ce soir la grosse bouffe de cantine. Ce 50th Anniversary Tour est probablement l’occasion de mettre définitivement un terme à la carrière de SCORPIONS avant qu’il ne soit définitivement trop tard, et que surtout la tournée suivante ne gâche ce qu’il reste de réel plaisir. Dans le cas contraire, pourraient ne demeurer sur piste que trois lévriers en bout de course et un morpion grassouillet entourant tous les quatre un félin racé, génial équilibriste et frontman hors pair: le décorum ne suffira alors plus à compenser…
(Photos © 2010, 2012, 2015 et © 2016 pour les clichés non-datés)