"Nous réouvrons nos portes ce mardi 1er décembre pour le concert de Whitesnake", annonce Forest National suite à 10 jours de fermeture et d’annulations en tous genres pour cause d’alerte-attentat niveau 4 à Bruxelles. Ouf, à un jour près, ce concert était lui aussi annulé et nous n’aurions pu jouir du plaisir de revoir 110 minutes durant un grand contributeur à l’histoire du rock british – et donc du rock mondial. Examining the pre-1987 Whitesnake, they were one of the best blues-rock bands you’re ever likely to hear...
Avec d’omni-présentes background vocals qui (biffez les mentions inutiles) noient / supportent / camouflent / secondent quelque peu l’organe du beau David Coverdale, la voix de WHITESNAKE semble néanmoins tenir la distance malgré les années qui s’accumulent au compteur. A l’instar soit dit en passant de son physique en général: mais quel est donc son élixir de "jeunesse" qui fait que les six années qui se sont écoulées depuis notre dernier face-à-face aient laissé davantage de stigmate sur notre corps devenu que chez cet inoxydable et inoxydé Coverdale ?! Des noms, on veut des noms ! Quel est son sorcier, quelle est sa recette, qui est son gourou, de quoi est composée cette mixture dont il se ressert d’ailleurs plus d’une fois en cours de concert…?!
Ce Purple Tour 2015 fait ainsi la part belle aux compositions datant de l’époque où Coverdale officiait encore au sein de Deep Purple. Il n’en demeure pas moins que la set-list ne néglige nullement les indémodables classiques et incontournables hits estampillés WHITESNAKE, malgré l’absence de Dough Aldrich (heureusement croisé récemment au Spirit of 66 aux côté de Glenn Hughes). Autre transfuge évidemment absent ce soir: Bernie Marsden, rencontré lui aussi par bonheur cet été au Ramblin’ Man. Si Deep Purple reste ainsi indirectement le fil rouge de nos récents gigs, il en est quelque peu de même de Ted Nugent avec la présence ce soir à Forest National de deux de ses anciens comparses avec qui nous avons passé deux-trois soirées lors de son US Tour 2000: Tommy Aldridge qui est toujours aux drums de WHITESNAKE ce soir et Marco Mendoza qui, après avoir ensuite quitté Thin Lizzy, officie maintenant à la basse des DEAD DAISIES qui assurent une remarquable et décoiffante première partie.
WHITESNAKE assure en définitive un concert de bonne facture, sans surprise ni coup d’éclat particulier même si certains morceaux ont, sur scène, moins bien vieilli que d’autres: comme le vin, il est des millésimes qui tiennent moins bien la distance, ce qui n’enlève rien au (re)nom du château qui les a produits. A déplorer toutefois la longueur, la lourdeur et la fatuité des deux aussi interminables qu’inutiles soli de guitare: s’ils sont d’un affligeant soporifisme, ils permettent probablement à Coverdale d’aller se repoudrer le nez et changer de toilette. Défilé de mode ou concert, sa garde-robe sera une troisième fois sollicitée lors du drum-solo d’Aldridge qui nous laisse quant à lui une impression cette fois nettement plus positive de par la créativité qu’on lui (re)connaissait déjà par ailleurs. Quand on n’a plus rien à prouver…
Nous aurions préféré que WHITESNAKE nous convie dans l’intimité d’une Ancienne Belgique surchauffée comme ce fut le cas lors de son dernier passage par Bruxelles, mais Forest National en configuration club (bien, très bien rempli) a néanmoins tenu la distance. Un voyage dans le temps et dans des sonorités du siècle dernier que nous avons savouré sans culpabilité aucune comme une madeleine enfouie, et que The DEAD DAISIES en première partie ont réellement contribué à magnifier, et pas qu’en affichant un line-up de belles brochettes d’ex-Motley Crue, ex-Thin Lizzy, ex-Ted Nugent et ex-Guns’n’Roses, excusez du peu.
En débutant son set avec le Imagine de John Lennon mais en version so(m)brement instrumentale, Warren HAYNES rend lui aussi hommage mais à sa manière aux victimes parisiennes des attaques terroristes de vendredi dernier. Avec l’humilité, la décence et la retenue des grands : sans un seul mot introductif, sans une phrase par la suite… Un seul morceau d’entrée de jeu et tout est dit, sans même une allusion plus appuyée pour qui n’aurait pas compris la densité du moment: let the music do the talking….
Accompagné par un remarquable lead violon virevoltant et un banjo tout aussi lead et électrifié, c’est toute une partie du répertoire de GOV’T MULE et des ALLMAN BROTHERS que la clique à HAYNES fait tout à coup sonner fort cajun et Bayou – et ce n’est pas pour nous déplaire. Par contre, le blue grass fort appuyé dans lequel Warren a récemment viré est moins excitant, moins entertaining, mais on s’en accommode. L’acoustique toujours aussi exceptionnelle du Kursaal de Limbourg rajoute à l’esthétique du cadre, même s’il l’on suppute les lieux moins reluisants en pleine lumière qu’ils ne le sont de par la magie d’un light show sobre mais efficace. Welcome back in Europe, Mr. Haynes, ce fut un réel plaisir de se taper l’incruste deux heures et demi durant en votre compagnie, même sans le Mule…
Parcourir les entrailles de Forest National colorées de tags du sol aux plafonds, zig-zaguer entre les semi-remorques stationnés et déambuler entre les caisses de matos entreposées de-ci de-là constituent toujours un moment très intense. Déboucher ensuite backstage avant de glisser frontstage génère le second frisson qui s’enchaine bien vite au premier. Juste avant le troisième, lorsque depuis le pied de la scène le regard parcourt la cuvette de Forest National qui déborde de monde jusqu’au dernier étage bien haut, là-bas bien loin de la scène. Ces trois frissons conjugués continuent de valoir leur pesant d’or, chaque fois renouvelé…
Si ce n’est qu’un quatrième frisson vient ce soir parcourir l’échine. Peu après que les lumières s’éteignent et à l’issue d’un envoutant Boléro de Ravel annonçant crescendo l’arrivée de SIMPLE MINDS sur scène, les cris et hurlements des 8.000 quinquas (… et plus si affinités) s’interrompent. Plutôt que commencer leur show en fanfare, les Ecossais se tiennent debout, alignés, presqu’au garde à vous, visiblement graves, plantés au beau milieu de la scène baignée d’un impressionnant silence. Jim KERR s’avance face au public, micro en main, sous une lumière blanche et blafarde: "Habituellement, c’est cool d’être chanteur dans un groupe, mais parfois c’est très difficile quand on doit s’exprimer et qu’on ne trouve pas ses mots. Je vous demande une minute de silence en hommage à tous ceux qui ont perdu la vie hier à Paris, ensuite nous jouerons…". Les trois écrans, derrière et de part et d’autre de la scène, arborent le bleu-blanc-rouge (…sang) de circonstance. Après un « Merci ! » (en français dans le texte), chacun de rejoindre ses instruments sur scène, et le show de véritablement commencer.
Huit photographes accrédités, quatre de part et d’autre de la petite avancée, et impossible de passer de stage left à stage right pour tirer les clichés de son choix : il en est ainsi afin de ne pas obstruer les deux cameramen arpentant, eux, de gauche à droite le frontstage caméra à l’épaule. Soit. Qu’à cela ne tienne, SIMPLE stage left et MINDS stage right n’a pas annulé son concert suite aux attaques terroristes de la veille à Paris, contrairement à quantité d’autres spectacles mais moyennant une présence policière lourdement armée aux entrées et une fouille minutieuse de notre équipement photographique. Le seul fait mérite d’être souligné, sans éclipser la constatation manifeste que le band semble rester plus jeune que jamais semble-t-il avec une nouvelle galette en guise d’élixir d’éternelle jeunesse.
Une pause de 15 minutes à l’issue de la première heure n’est que reculer pour mieux sauter encore 75 minutes durant… et pas moins de 28 titres au total. Si Forest National se métamorphose à nouveau ce soir en une gigantesque piste de danse, ce sera partie remise demain à 30 petits kilomètres seulement. SIMPLE MINDS renverra l’ascenseur au Sportpaleis lui aussi, retournant bien à la Belgique l’accueil que nous, les premiers hors UK, avons réservé au quintet écossais des Simples d’Esprit début des eighties. C’était il y a bien, bien plus de 30 ans aujourd’hui. C’était hier. Et aussi phénoménal que ce soir…
Just taste the true black and white dream of deep belgian blues, annonce l’affiche. Il est de ces groupes à l’instar de LIGHTNIN’ BUG à propos desquels on continue et continue à se demander quelle mauvaise fée s’est penchée sur leur berceau à leur naissance. Car ils ont tout – et plus encore – pour percer, pour éclater à la face du monde, pour exploser et débouler sur les scènes les plus prestigieuses. Mais non, ils demeurent au contraire presque confidentiels, sans la gloire ni les honneurs qu’ils mériteraient pourtant amplement plus que bien des manchots qui rayonnent de manière si creuse, si stérile et si futile dans le grand public. C’est injuste, c’est triste mais c’est ainsi…
Avec le patron des lieux à la manœuvre, tantôt derrière le bar tantôt à proximité de la scène, nous avons bien affaire aux Frères Dalton cet après-midi. Trois sur scène – LIGHTNIN’ BUG à l’affiche – et le quatrième, espèce de Jo Dalton, maître de cérémonie comme il se doit. Maitre des lieux surtout, et quels lieux ! A l’heure de la sieste dominicale, ces Dimanches après-midi sur la Terre à la Ferme Madelonne demeurent le cocon le plus hot, le plus soyeux et le plus vibrant qui soit pour terminer en douceur le weekend. Ou pour se remettre des excès de la veille.
A propos d’excès, LIGHTNIN’ BUG serait plutôt bon élève, abonné davantage à la régularité et à la pondération plutôt qu’à la débauche inutile et au show superflu, apanage de ceux qui n’ont pas leur musique pour s’imposer au bon goût. Tout est pesé, sous-pesé, réglé et affûté avec les trois mousquetaires de ce pur Chicago blues d’autant plus percutant qu’il ne sombre pas dans le piège du blues-rock facile de supermarché ou d’ascenseur. Car le blues, tout le monde – ou presque – sait le jouer. Mais du vrai blues, léché comme il se doit, intelligemment réfléchi, savamment construit et sauvagement mais finement joué, c’est de la volupté de fin gourmet qui n’est pas à la portée du premier joueur du dimanche (après-midi sur la terre) venu…
Le Michael Shepherd Band ouvre la soirée avec 20 minutes d’avance sur le timing annoncé – deuxième fois d’affilée que la Rockhal nous fait le coup. Et Shepherd et sa clique ont beau être du coin, ce n’est pas une raison pour ne pas laisser les gens arriver de plus loin, non mais ?! Place nette est ensuite faite à l’heure dite pour 77 (aka Seventy Seven): une formation hispanique littéralement explosive qui a le bon goût de secouer le cocotier en alliant panache et compos au napalm.
Ces gamins-là ont dû, enfants, tomber et macérer des années durant dans une marmite de sangria épicée AC-DC, et n’en ressortir que pour sniffer à l’excès du Airbourne pendant toute leur adolescence – de laquelle le batteur semble d’ailleurs à peine émerger. Excellemment gal-va-ni-sants, ces jeunots !
Et que dire de leur r’n’r touch lorsque voilà-t-y pas qu’ils remontent sur scène pour un virulent rappel de Dieu le Père (Madre de Dios ?) alors même que les lumières de la Rockhal se sont rallumées et que la sono d’ambiance crache derechef son Aerosmith dans l’attente de Michael Schenker. Didju dis, ‘ y a pas que la sangria qui est relevée, à Barcelone…!
Le Temple du Rock ne fait pas énormément recette ce soir – cela vaut tant pour le contenant que pour le contenu. Pourtant, avec son dernier opus au titre très mystique "Spirit on a Mission ", Michaël SCHENKER et son Temple of Rock continue néanmoins de nous surprendre. Große ying & yang, Herr Schenker ! Et ce n’est pas faute de ne pas l’avoir (re)vu depuis belle lurette, ni lui ni d’ailleurs cet été ses anciens comparses de SCORPIONS. Ni même tout dernièrement encore son autre alter ego transfuge du band teuton: Uli Jon ROTH.
Entouré à nouveau ce soir de Buchholz et de Herman Ze German, ce ne sont pas moins de 4 piliers historiques du SCORPIONS vintage qui sont à la fête de notre agenda automnal. Yawol ! Et yabon surtout.
SCHENKER déroule un set d’1h35′ sans temps morts aucun… mais pas plus de rappel non plus. Même pas fait le coup de la panne… Le minimum minimorum syndical est de stricte rigueur ce soir, et cela se révèle un peu short pour nous gratifier d’un florilège réellement exhaustif de UFO et de SCORPIONS tout en ne négligeant pas non plus sa production propre. Mais bon, le condensé demeure néanmoins hautement jouissif, bien davantage que peut l’être un concentré à défaut de tomates fraîches. Les vocals démontrent encore leurs limites et demeurent le (seul) point faible de la formation.
Non, nous ne crachons pas dans la soupe, Michael, ni ne mordons la main qui nous tend notre pitance, mais il faut dire ce qui est. Ces relatifs bémols mis à part, SCHENKER himself n’a plus rien à prouver ni en tant que compositeur hors pair ni en tant que musicos: sans esbroufe mais avec flamboyance, il nous démontre à nouveau ce soir qu’il n’a effectivement plus rien à prouver. La véritable étoffe des héros…
Michael Schenker‘s Temple of Rock @ Rockhal (05 nov. 2015) now online – Simple Minds @ Forest National (14 nov. 2015) now online – The Scorpions @ Sportpaleis (22 nov. 2015) – Whitesnake @ Forest National (1er déc. 215) now online – UFO + Judas Priest @ Forest National (16 déc. 215) now online :
But also : Warren Haynes @ Le Kursaal (17 nov 2015) now online – The Stranglers @ Het Depot (19 nov. 2015) – Steven Wilson @ Ancienne Belgique (23 janv 2016) – Girslchool + Saxon + Motorhead @ Zenith Lille (1er fev. 2016) / Cancelled – R.I.P. Lemmy 🙁 – City & Colour @ Trix (16 fev. 2016)