Ozzy, deuxième ! Qui m’impressionne-t-il le plus : Ozzy ou Zakk WYLDE son guitariste ? Forest National doit encore se souvenir de Black Sabbath à l’époque où Ozzy en était encore un des leaders, mais je n’en étais malheureusement pas. A défaut de merle, je me contente de grive – ou vice-versa : mais comme ceux qui ne raffolent pas du poisson adorent parfois les fishsticks, Ozzy dans le feu de l’action laisse presqu’oublier le Sabbath – et je m’en régale jusqu’à l’indigestion. La date de péremption du duo Ozzy – Zakk étant loin d’être atteinte, je ne sais pas en 1989 que nos chemins se croiseront encore bien des fois ultérieurement. Et pour notre plus grand plaisir, même s’ils ne savent pas qu’il est partagé. U.D.O en première partie : inodore, incolore et insipide – sorry guy.
Hé oui – ou plutôt hé non: plus de trace de mon ticket. Mais que de souvenirs en tête, même s’il y avait encore une fois à boire et à manger (au propre comme au figuré). Sont à l’affiche en ce bel été 1986: The Beat Farmers (j’arrive trop tard que pour les voir, merci les bouchons flamands), The Waterboys (cool), The Robert Cray Band(‘ me souviens plus), Simply Red (j’aime pas les rouquins), Lloyd Cole & the Commotions (propre sur lui), Talk Talk(aaaaaah !), UB40(reggae night), Elvis Costello & the Attractions (bof) et en tête d’affiche Simple Minds qui transforme la plaine en piste de danse géante. 70.000 personnes à Torhout le samedi, 70.000 à Werchter le lendemain – combien de litres de bières et de kilos de frites pour sustenter tout ce bas-peuple au sein duquel il fait si bon être…?
6 novembre : anniversaire de ma grande-sœur que j’emmène pour l’occasion (re)voir l’Iuane à Deinze. Sauf erreur de ma part, ma première et dernière venue dans cette salle, et dans ce bled. Un moment fort qui reste gravé : le quart d’heure précédent l’entrée sur scène d’Iggy, toutes lumières éteintes, la sono crachant une musique hypnotique au possible sur un beat binaire composé principalement de percussions et d’autres sons hybrides, qui pour peu mettraient toute l’assemblée dans une transe pas possible ! L’arrivée d’Iggy sur scène est presqu’une délivrance – c’est dire… !! La Bête est lâchée: il n’y a plus qu’un pantin électrique désarticulé qui attire tous les regards… La mention manuscrite CrazyHead que j’appose sur le ticket d’entrée signifie qu’à l’époque déjà je me disais qu’il serait de bon ton que je me souvienne plus tard du nom du band qui ouvrait…!
Faut-il s’étendre sur la chose… ? Oui, j’en suis, on en est, sur la plaine de Werchter. Et je peux même dire que nous y allons en Ford Capri 2.0 V6 – qui me boit toute ma solde de milicien. Et j’arbore même sur la vitre arrière un poster de Michaël pour forcer le trait… Il faut en être – du moins pour pouvoir maintenant être en mesure d’en parler, de raconter, de dire, de témoigner. Non, il ne ressemble pas encore à ET – quoique. Mais je ne parlerai davantage qu’en présence de mon avocat… Le ticket mentionne la présence de guest : si c’est écrit, c’est que c’est vrai.
Surlendemain de Rush à Francfort : Alice sur scène à Bruxelles – Chrome Molly en première partie ! C’est l’époque où notre Vincent Furnier se met en scène dans un décor d’apocalypse à la Mad Max et fait jouer les Rambo à son band. Ma première rencontre avec le Grand Show : était-ce la potence ou la guillotine, cette fois-là ? Comprenne qui comprendra. Serpent, hémoglobine, figurants, danseuses, canne et camisole de force : le Grand Cirque a débarqué en Belgique et tous les ingrédients sont bien présents sur la scène de Forest National. Alice reste la référence pour quantité de bands encore à ce jour, qui tentent de se prévaloir dans leur mise en scène et dans leur look d’une inspiration alicienne sans même lui arriver à la cheville. Que les copies sont pâles à côté du Maître… ! Les premiers rangs ressortiront maculés de (faux) sang, ce qui est somme toute tout à fait assorti à notre tenue: revêtus de notre t-shirt Rush acheté l’avant-veille en Allemagne, on se fait harponner dans la file à l’entrée du concert par qui deviendra le troisième Belge le plus fêlé du trio canadien – avant de rencontrer 20 ans plus tard le quatrième lascar. Sacré Vincent, va : comme quoi même à un concert d’Alice, on parvient à se la ramener à Rush…
Un RUSH et deux NUGENT en deux mois : le nirvana s’appelle rock’n’roll en ce printemps 1988 ! Mini European Tour pour RUSH qui avale quelques dates – toutes sold out évidemment – en Angleterre, Hollande et Allemagne uniquement. On fonce sur Frankfurt, à défaut de pouvoir s’offrir – service militaire oblige… – d’autres gigs de la tournée européenne : deux petits Belges perdus au milieu d’une marée humaine composée d’autant d’Allemands que de GI’s venus sniffer un peu de leur patrimoine nord américain. WISHBONE ASH en première partie : parfait pour accueillir le Rush Hold Your Fire Tour 1988. Quelques clichés de piètre qualité ne vaudront pas de figurer ici. C’est l’époque synthés par excellence, et sonorités années 1980. Certes, ça vieillit peut-être moins bien à l’oreille, mais la qualité intrinsèque des compos et la technique de nos lascars sont, étaient et resteront intactes. Un grand moment à vivre live, au premier rang quasi, pour ce deuxième rendez-vous avec l’Histoire. Des milliers de ballons, rouges évidemment, seront lâchés du plafond sur le public en clôture du show – superbe ! Les bouchons ont encore bien servis ce soir : n’empêche, le volume de l’auto-radio est quand même minable sur la route du retour…
Le Nuge dans une salle de moyenne capacité en plein centre ville : on croit rêver ! Ca sent bon la bière et la cigarette, le plafond est bas, la salle est déjà bondée à notre arrivée et un mur de Marshall (ou de Peavey, déjà ?) annonce la couleur. Tous les ingrédients sont réunis pour une soirée chaude de chez chaude chez les Kaas! Après le fromage suisse en entrée comme la veille à Paris, le plat de résistance: le Nuge débarque sur scène, virevoltant et tournoyant comme un Liliputien suspendu à un câble invisible : une entrée en scène dont je ne suis pas près d’oublier le moindre détail ! Mon premier concert – et l’un des derniers également, Dieu m’en préserve – où mon oreille ne distingue parfois plus les sons tant le volume est au rouge, le cerveau ne captant plus qu’un long biiiiiiiiiiiiiiip en lieu et place de ce qui sort des Marshall : impressionnant. If it’s too loud, you’re too old : n’empêche…! Le set de Gonzo sera subjectivement parfait, le Nuge occupant l’espace comme s’il était trois à lui seul, arpentant la scène d’un côté à l’autre, contraint de slalomer entre ses comparses, quand pas sautant du haut de ses Marshall. Waow ! Les Kaas en ont eu plein la vue et plein les oreilles. Le show disponible en DVD « Ted Nugent’s New Year’s Eve Whiplash Bash 1988 » filmé le 31 décembre de cette même année à Detroit, Rock City, devant 20.000 Michiganiacs est la copie (quasi) conforme de la bombe qui s’est abattue sur Tilburg un beau et surtout un bon, très bon soir d’avril 1988.
Le Nuge à Paris vaut bien une journée de dispense de service militaire, non ?! J’ai obtenu de longue date déjà le ticket numéroté… 00008 : un présage pour un concert subjectivement géant dans un Zénith tristement vide ? Les Parigots auraient-il cru à un poisson d’avril ? Ou peut-être sont-ce les Suisses de Krokus en 1ère partie qui font fuir (à raison) la populace parisienne ? Peu importe : mon deuxième face-à-face avec le Nuge est d’autant plus puissant que Derek St-Holmes est de retour à ses côtés pour assurer pas mal de vocals et prendre en charge une rythmique qui enfle d’autant le jeu aérien du Nuge. Nom de Dieu, quelle puissance de feu ! La sueur dégoulinant de sa crinière sur ses Gibsons Byrdland donnent à celles-ci un éclat d’or dont il n’a pourtant pas besoin pour nous balancer ses classiques comme ces derniers et ô combien puissants Painkiller et autres Little Miss Dangerous.
Nugent reste Gonzo, un guitariste déjanté, spectaculaire et doué, un show sonore et visuel à lui tout seul ! Quelques clichés argentiques sans grande valeur ni qualité immortaliseront cependant sur les murs de ma chambre cette soirée dantesque. Et ce n’est que sur la route de nuit qui me ramène au bercail, après quelques haltes parisiennes désaltérantes, que l’idée me vient tout à coup à l’esprit: et pourquoi n’irais-je pas revoir le Nuge demain soir en Hollande, finalement ?! Le début d’une longue succession de concerts, de déplacements, de voyages et de souvenirs vient de s’enclencher par un curieux concours de circonstances dont furent victimes un beau soir mes neurones encore probablement sous le choc et les décibels…
Gainsbarre chez lui, en territoire conquis ! Love on the Beat: anal, buccal, musical et fatal, Gainsbourg et ses Blacks chauffent Forest National à blanc (… des Noirs qui chauffent à blanc sont toujours impressionnants). Chapeau, Monsieur Gainsbourg, chapeau bas pour ce moment d’anthologie à la hauteur de ce sold out et de cette standing ovation qui dure, qui dure, qui dure à n’en plus finir. Cerise sur le gâteau : Serge fête ses 60 ans ce soir, et le « Happy Birthday to You » entonné (non : hurlé !) par 8000 gorges pour le faire revenir sur scène après un nième rappel déjà nous ramène un Gainsbourg presque chialant, balbutiant ces paroles qui résonnent encore dans ma tête : « Putain, même à Paris hier ils ne m’ont pas fait ça… ! ». Poignant… D’autant plus qu’une journée exceptionnelle m’attend après-demain à Paris.
Torhout-Werchter 1987 : quelques dizaines de milliers de bestiaux et moi et moi ruminent et broutent ce qu’il reste d’herbe dans la plaine de Werchter (et je ne parle pas de celle qui se fume…). L’affiche est encore une fois très (trop ?) éclectique sous le soleil exactement : Julian COPE (bof), The TRIFFIDS (pfff), The HOUSEMARTINS (hum) et – enfin ! – pour dérider la foule et secouer tant les esprits que les corps, l’Iguane himself: Iggy POP en chair et en os, au propre comme au figuré pour Ceux Qui Savent. On m’avait prévenu, on m’avait prévenu, mais il n’empêche qu’il faut le voir pour le croire – un grand, grand moment. Mais le soufflé retombe bien vite avec ECHO & The BUNNYMEN qui enchaîne, pour remonter quelque peu avec Chrisie et ses supers PRETENDERS. C’est l’époque de gloire pour EURYTHMICS qui poursuit les hostilités – Who’s that Girl ? a capella : quel souvenir ! – puis le moment vient pour l’Archange de prendre possession des lieux et des cieux : Peter GABRIEL sledgehammerise la plaine flamande…