Ainsi donc 2024 sonne le glas du Night Of The Prog Festival, 14ème du nom mais qui n’aura pas survécu à de probables aléas financiers s’il faut en croire les informations qui circulent. Triste nouvelle pour un festival peu commun dont un décor sans pareil sert surtout de toile de fond : le légendaire site de la Loreley en surplomb d’un Rhin aussi romantique que majestueux sur lequel, comme l’année passée (merci la météo), un soleil rougeoyant se couche pour noyer tout l’amphithéâtre naturel d’une lumière tout simplement atomisante.
Il y a de ces moments uniques où lumières et sons se marient pour magnifier l’instant comme jamais, et c’est ainsi sur la bande-son d’Alex-Henry FOSTER que se déroule le spectacle d’une Loreley tout simplement transcendée. Quel autre meilleur moment de la journée Alex-Henry FOSTER aurait-il pu choisir pour exécuter son set qui, dans le soleil couchant, revêt une nouvelle dimension ? Quel autre meilleur moment de la journée et quelle autre meilleure bande-son le soleil aurait-il pu choisir pour tirer superbement sa révérence après une journée caniculaire par plus de 30° ?
Alex-Henry FOSTER – qui justifie principalement et à lui seul notre présence ici – était le grand absent de l’édition précédente en nous posant un sacré lapin, son opération du coeur réalisée en urgence ayant eu pour conséquence d’annuler sa tournée européenne 2023 mais aussi et surtout de le sauver d’une inéluctable mort. Mais il n’en est plus rien cette année avec un FOSTER en toute grande forme qui nous livre un set bien, bien énergique : le contexte Night Of The Prog aurait en effet pu nous laisser craindre une set-list plutôt atmosphérique, aérienne et soft voire plombante en phase avec l’ADN « prog » du festival éponyme, mais FOSTER a au contraire choisi l’option cocotier en nous secouant par une programmation bien enlevée et bien électrique, ouf.
Le public ne portera pas cette fois du bout des bras tendus un Alex qui le fend néanmoins, lui offrant en sacrifice sa guitare rouge qui partira loin, très loin dans le public en gémissant de mille accords provenant de centaines de doigts courant sur son manche. L’instrument demeure relié à son propriétaire par quelques dizaines de mètres d’un câble électrique verdâtre que FOSTER laisse glisser entre ses doigts à l’instar d’un pêcheur donnant du mou à sa ligne pour mieux ferrer sa proie. La subtile fusion que partage Alex Henry FOSTER avec son public demeure cette espèce de symbiose permanente entre ce qu’il reçoit comme ondes positives et ce qu’il offre comme harmonie(s) : c’est du donnant-donnant multisensoriel ou le plaisir de recevoir découle de l’amour de donner. Alex Henry FOSTER et ses Long Shadows restent définitivement un band à part, une fratrie à part, une famille à part quand il s’agit de communier à l’unisson (… amen). Déjà hâte d’être dans deux semaines à Cologne pour une bénéfique repasse du câlice…
ARENA qui enchaîne est d’autant plus soporifique que le band fait le choix d’un prog aussi mainstream que téléphoné, synthétisant à lui seul tous les clichés répulsifs qui valent tant de critiques à un genre pour le moins éculé si l’on s’en tient à de telles démonstrations. Ce n’est certes pas l’avis général de l’assistance qui garnit et remplit ce superbe amphithéâtre extérieur, en réservant à ARENA un accueil et un succès franchement surprenant: on n’est manifestement pas aux Nights Of the Prog pour rien.
La tête d’affiche du jour, RIVERSIDE nous réserve par contre la surprise du chef et même la surprise du jour en livrant un set ô combien puissant, rythmé et bien plus couillu et enlevé que les quelques titres qui nous sont familiers. On se rapprocherait par moment de Porcupine Tree qu’on n’en serait pas surpris. La basse de Mariusz Duda emplit l’amphithéâtre comme nulle autre pareille, gloire à l’ingé-son qui réussit là une prouesse peu commune : offrir à la quatre cordes toute la place qu’elle mérite quand son jeu est digne d’intérêt – ce qui est présentement le cas ce soir.
Le soleil est couché depuis bien longtemps lorsque les lampions de la fête s’éteignent, laissant le site baigné d’une lumière lunaire rendant la Loreley plus fantomatique encore. C’était le 1er soir du 14ème, dernier et ultime Night Of The Prog Festival – triste fin mais ô combien flamboyante, joyeuse, festive, explosive et franchement réussie.